Litchi de Madagascar

  • Publié le 3/11/2016 - Elaboré par GERBAUD Pierre
  • FruiTrop n°244 , Page 34 à 37
  • Gratuit

Prévisions 2016-17 : une importante campagne en perspective ?

Pour la sixième année consécutive, les opérateurs de la filière litchi de Madagascar ont décidé de reconduire la même organisation de campagne. Avec de 16 000 à 18 000 tonnes exportées vers les marchés européens, la filière malgache semble avoir trouvé un rythme de croisière satisfaisant en termes d’organisation et de résultats économiques, si importants pour un pays qui reste l’un des plus pauvres de la planète.

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La professionnalisation de la filière malgache

Les quantités de litchi exportées vers l’Europe n’évoluent pas de façon spectaculaire, mais il faut bien voir que la structuration de cette filière a nécessité du temps et qu’elle s’est effectuée dans un contexte général de repli économique. Par ailleurs, il convient de replacer ces volumes dans le cadre de campagnes extrêmement courtes, puisque les récoltes s’étalent sur environ un mois et demi. La combinaison des transports aérien et maritime permet d’allonger la commercialisation sur une plus longue période, de la première quinzaine de novembre à la première quinzaine de février.

L’expérience aidant, les 18 000 tonnes écoulées en Europe correspondent aux capacités d’absorption du marché qui, d’année en année, se concentre davantage autour des fêtes de Noël et du jour de l’an. Ainsi, le calendrier de disponibilité du fruit constitue un atout indiscutable, mais en détermine également les limites. Les importations communautaires de litchi de Madagascar ne seraient évidemment pas les mêmes si elles intervenaient à un autre moment de l’année. Il suffit de voir les volumes commercialisés en dehors de cette période pour s’en convaincre (Mexique, Chine, Vietnam, Israël). L’attraction des fêtes de fin d’année est le véritable moteur de la consommation des litchis en Europe. Mais, paradoxalement, la grande distribution, qui commercialise la majeure partie des litchis malgaches, s’inscrit dans un mouvement de plus en plus rapide où le produit d’appel change au rythme des exigences marketing des enseignes. Ainsi, le soutien publicitaire et la communication, qui accompagnent les ventes, s’estompent une fois les fêtes passées, alors que le produit reste une alternative aux autres fruits d’hiver.

La recherche de nouveaux débouchés anime également la filière malgache. Lors de la dernière campagne, quelques tentatives ont été menées vers les pays d’Europe de l’Est, et notamment la Russie. Mais les difficultés logistiques et le manque d’assurance de paiement ont limité ces essais. Quelques conteneurs ont été expédiés en Asie, mais sans grande évolution par rapport aux campagnes précédentes. En revanche, les pays du Golfe se sont avérés plus réceptifs et auraient importé autour de 2 000 tonnes de litchi. Ils ouvrent ainsi de nouvelles perspectives, certes modestes, face au plafonnement des marchés européens qui demeurent la cible privilégiée des exportateurs malgaches. Des pourparlers avec l’Afrique du Sud se déroulent également pour des importations vraisemblablement destinées à la transformation, secteur encore peu développé à Madagascar.

La structuration de la filière malgache n’est pas seulement visible aux travers des résultats obtenus en termes de volume exporté et de retours économiques. Il ne faut pas oublier la face immergée de la filière, celle moins visible mais qui en construit les bases. Si les volumes exportés depuis six ans n’ont pas connu un essor remarquable, la professionnalisation de la filière malgache a, elle, profondément avancé. Ce fut tout d’abord la mise en place de procédures strictes garantissant le respect des réglementations européennes concernant l’innocuité des fruits. Ce fut ensuite l’accession des exportateurs malgaches à diverses certifications, dont la plus répandue GlobalGap. C’est aujourd’hui chose faite, l’ensemble des stations de conditionnement bénéficiant d’une certification. Ceci ne s’est pas réalisé par un simple coup de baguette magique, mais a nécessité d’importants efforts, tant organisationnels que financiers de la part des opérateurs. Stations construites ou reconstruites en conformité avec les normes en vigueur, investissements dans des matériels de conditionnement, aménagements spécifiques pour les travailleurs dans les stations sont quelques exemples des progrès réalisés silencieusement au cours des dernières années. Les démarches de certification ne s’arrêtent pas là et les opérateurs malgaches poursuivent leur professionnalisation en incluant, pour nombre d’entre eux, le module Grasp proposé par GlobalGap. Il s’agit d’un additif à la certification de base pour l’évaluation des risques concernant les pratiques sociales. Ce module volontaire se penche sur les aspects santé, sécurité et bien-être des travailleurs au sein de l’entreprise.

Toutes ces améliorations sont louables et sans doute nécessaires à la pérennisation de la filière. Pourtant, depuis plusieurs années, un thème récurrent se confirme, celui de la qualité intrinsèque des fruits exportés par Madagascar. Les remontées d’informations des consommateurs et des distributeurs sont nombreuses à propos du calibre et du goût des fruits. La qualité gustative demeure un domaine complexe puisqu’il fait appel à des appréciations purement subjectives et donc difficiles à quantifier. Cela n’exclut pas de faire des recherches sur le vaste domaine des principes aromatiques du fruit. En revanche, l’amélioration du calibrage semble plus aisée à atteindre. Il existe bien sûr des facteurs limitants, tels que les conditions météorologiques qui ont des répercussions en partie sur la production ou la perte de poids du fruit lors du transport maritime. Néanmoins, des efforts devraient être envisageables si l’on considère que les exportations ne représentent qu’environ un cinquième de la production malgache de litchi. La critique du calibre des fruits est d’autant plus sensible que la filière sud-africaine maîtrise nettement mieux cet aspect, pour des tonnages certes inférieurs. C’est l’une des raisons pour lesquelles la filière malgache entame de nouvelles démarches fondées sur la certification GlobalGap. Il s’agit de mettre en place des certifications au niveau de la production, alors que jusque-là elles étaient cantonnées aux exportateurs. A l’instar des producteurs de haricot vert du Kenya par exemple, les producteurs de litchi sont appelés à se regrouper pour bénéficier des démarches de certification. La mise en marche du processus est à saluer car elle est source d’une meilleure intégration des différents maillons de la filière. Avec une certification dès la production, les exportateurs espèrent pouvoir mieux maîtriser leurs approvisionnements en fruits et agir plus fortement sur l’amélioration de la qualité de ceux destinés à l’exportation. Ce mouvement initié progressivement paraît capital pour le maintien des exportations de litchi de Madagascar, mais sa mise en place s’avère complexe. Il faudra, vraisemblablement, attendre plusieurs campagnes pour en apprécier les résultats concrets.

Une campagne précoce et importante

L’hiver austral, bien marqué cette année, a favorisé une floraison et une fructification importantes pour toutes les origines de l’océan Indien. Au-delà d’une production conséquente, la récolte de litchi s’annonce précoce. Elle serait anticipée d’environ une semaine. Toutefois, les variations météorologiques des deux mois précédant la date éventuelle de récolte peuvent influer sur la récolte définitive, tant en termes de précocité que de qualité des fruits. Pour Madagascar, le déficit de précipitations des derniers temps semblent indiquer qu’une part suffisante des fruits arrivera à maturité pour un démarrage précoce, mais la taille moyenne des litchis risque d’en pâtir. Les premiers lots expédiés par avion devraient être disponibles dès la semaine 44, en provenance de l’ensemble des origines exportatrices (Afrique du Sud, Mozambique, Maurice et Madagascar), à l’exception de la Réunion dont la campagne devrait débuter vers mi-novembre comme d’habitude. Le démarrage précoce et simultané des exportations risque d’engorger un marché encore peu concerné par les produits festifs.

La campagne bateau est, elle aussi, annoncée précoce. Elle devrait se dérouler selon les mêmes dispositions que les années précédentes en ce qui concerne le volume. Deux navires conventionnels sont programmés pour acheminer les fruits alimentant les GMS pour les fêtes de Noël et du jour de l’an. La précocité de la récolte devrait étendre la période de commercialisation grâce à deux week-ends de ventes avant les fêtes. Le calendrier de l’année dernière n’avait permis la vente que sur un seul week-end avant Noël. La campagne se poursuivra avec la livraison de conteneurs en début d’année. La demande en fruits labellisés Commerce équitable ayant progressé ces dernières années, les exportateurs malgaches comptent bien développer ce créneau avec une augmentation des volumes. Ce label sera présent sur une partie des litchis transportés sur les navires conventionnels, comme c’était déjà le cas lors des précédentes campagnes, mais également sur ceux transportés par conteneurs. Cela permettra un allongement de la campagne pour ces produits spécifiques qui n’étaient disponibles, jusque-là, qu’une partie de la campagne. Ils sont traditionnellement destinés aux pays scandinaves, au Royaume-Uni et à l’Allemagne, mais la demande s’étend progressivement aux marchés plus au sud de l’Europe, comme la France et l’Espagne.

Si les annonces de précocité et de forte production se concrétisent, la campagne 2016-17 devrait être commercialement âpre compte tenu du contexte économique toujours difficile sur les marchés européens

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