Litchi de Madagascar en 2015-16

  • Publié le 12/06/2016 - Elaboré par GERBAUD Pierre
  • FruiTrop n°241 , Page 48 à 53
  • Gratuit

Une certaine lassitude ?

Pour la quatrième campagne consécutive, la filière du litchi de Madagascar enregistre un bilan positif, notamment grâce à la sécurisation qualitative des fruits alliée à une logistique bien rodée. Toutefois, la mécanique bien huilée, lancée sur les rails de la réussite, semble ralentir quelque peu...

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Des volumes en légère hausse

En 2015, la question de l’organisation de la campagne d’exportation des litchis de Madagascar ne s’est pas posée. En effet, les résultats des campagnes antérieures apportant une satisfaction générale des opérateurs, il n’y avait pas lieu de modifier cette stratégie payante. Volumes équivalents, organisation logistique identique, jusqu’aux navires conventionnels affrétés qui sont restés inchangés ! Grâce à une production relativement précoce pour la troisième saison successive, les dates de départ et donc d’arrivée des navires conventionnels ont aussi été peu ou prou les mêmes. Derrière cette apparente immobilité, seule la vigilance sur la qualité des fruits a été accentuée par le renouvellement et l’approfondissement des certifications et l’analyse renforcée des teneurs résiduelles de soufre. Pourtant, face aux bons résultats répétés des dernières campagnes, grande pouvait être la tentation d’augmenter les volumes expédiés vers le marché européen. Et ce fut le cas, mais dans des proportions contenues. Avec un total estimé de 18 477 tonnes, la campagne 2015-16 a dépassé la précédente de 687 tonnes.

Ces résultats quantitatifs font apparaître une légère régression des volumes expédiés par avion, poursuivant le mouvement observé depuis plusieurs années, et une augmentation des tonnages expédiés par navires conventionnels et porte-conteneurs. La principale progression provient des litchis acheminés par navires conventionnels avec plus de 600 tonnes supplémentaires, alors que les volumes par conteneurs n’évoluent que d’environ 80 tonnes.

litchi avion de madagascar - evolution des arrivage en France
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litchi avion de madagascar - prix import moyen en France
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Tassement des envois aériens

La tendance au recul des volumes avion de ces dernières années s’est confirmée, même si elle a été nettement moins marquée. Les 300 tonnes expédiées par avion représenteraient-elles le seuil moyen pour ce type de produit ? Sans doute, puisque l’évolution tend à fixer ce volume comme point d’équilibre.

Si l’on se réfère à la courbe des prix moyens du litchi avion de Madagascar pour les dernières campagnes, la tendance générale est identique, mais à des niveaux plus ou moins élevés. La campagne 2015 apparaît comme l’une des meilleures, les prix s’orientant progressivement à la baisse parallèlement au développement de l’offre, mais en restant sur des bases plus soutenues. Et ceci dans une situation équivalente de l’offre aérienne globale, qui varie peu d’une année à l’autre, représentant 1 200 à 1 300 tonnes importées toutes origines de l’océan Indien confondues et sur une même période de cinq à six semaines. Les différences de prix paraissent provenir davantage du positionnement des origines dans le calendrier de mise en marché des fruits et de leur prix de revient respectif.

La comparaison des dernières campagnes semble indiquer que des apports massifs et précoces de Madagascar favorisent de meilleurs résultats de ventes. C’est ce qui s’est passé en 2015. La campagne a commencé en semaine 46 avec des volumes importants, alors que les origines concurrentes de l’océan Indien étaient quasiment absentes. Pourtant, la campagne a débuté en France dans un contexte sombre, la vague d’attentats du 13 novembre réduisant logiquement la fréquentation des magasins. En semaine 47, les volumes atteignaient déjà leur point culminant. Les ventes s’effectuaient de façon assez fluide, les volumes restant modérés à l’échelle européenne et les prix demeurant soutenus. En semaines 48 et 49, les quantités réceptionnées s’amenuisaient fortement, alors que l’offre des autres origines se développait. Bien qu’orientés à la baisse, les prix se stabilisaient autour de 6.00 euros/kg en moyenne. Les arrivages en semaine 50 étaient peu importants et permettaient d’effectuer la soudure avec les premiers litchis bateau qui n’étaient disponibles qu’en fin de semaine.

Les cours des litchis malgaches ont également été soutenus du fait de la qualité des fruits. On ne parle pas ici du calibre, toujours hétérogène, mais de la tenue des litchis dans le temps, facteur qui a sans doute contribué à leur commercialisation satisfaisante. Cet élément unanimement souligné, mais difficilement explicable, a été particulièrement important tout au long de la campagne.

Durant la campagne avion, quelques lots de fruits frais branchés ont également été commercialisés à des prix stables et soutenus. Même marginales, ces expéditions montrent la possibilité de segmenter l’offre malgache, jusqu’ici monolithique. L’Afrique du Sud a déjà emprunté cette voie qui paraît prometteuse.

litchi avion de madagascar - evolution du prix import moyen en france
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Une longue campagne bateau

La campagne bateau aurait dû se dérouler à peu près de la même façon que la précédente. Confortés par les résultats antérieurs, les opérateurs ne procédaient qu’à une augmentation mesurée des volumes expédiés. L’image restaurée de la qualité sanitaire des produits malgaches depuis la mauvaise campagne de 2010-11 et l’assurance d’une surveillance renforcée pouvaient en effet laisser supposer la possibilité d’un accroissement de l’offre vers le marché européen et la recherche de nouveaux débouchés vers d’autres marchés. La relative précocité de la production militait également dans ce sens. Or, si les conditions théoriques semblaient remplies, la réalité du marché s’est avérée plus difficile que prévu.

L’ouverture officielle de la campagne a été décrétée le 19 novembre, soit deux jours plus tard qu’en 2014, pour tenir compte de l’arrivée à maturité de volumes suffisants de fruits pour entreprendre le chargement du premier navire conventionnel. Ce décalage apparemment minime allait modifier la commercialisation de cette première cargaison. Malgré un chargement rapide et efficace, les deux jours de décalage par rapport à la précédente campagne n’ont pu être comblés et le premier navire quittait Tamatave le 23 novembre. Dépassant le cap de Bonne Espérance et remontant les côtes africaines au maximum de sa vitesse de croisière, le premier bateau accostait à Zeebrugge le 11 décembre, soit un jour plus tard que l’année antérieure. Mais les hasards du calendrier ont fait que le 11 décembre 2015 était un vendredi. Le déchargement même rapide n’a pas permis de livraisons en magasins pour cet important week-end de ventes, contrairement à l’année précédente où le déchargement du premier bateau, débuté le mercredi, avait bénéficié de cette commercialisation anticipée. A part quelques expéditions sur des marchés proches, les ventes ne débutaient vraiment que le lundi 14 décembre.

La commercialisation de la cargaison du premier navire conventionnel s’effectuait de façon fluide, compte tenu de l’aspiration de la demande, dynamisée par de nombreuses mises en avant dans les magasins des grandes chaînes de distribution européennes, programmées durant la préparation de la campagne. Le week-end des 19 et 20 décembre, puis les jours précédant les fêtes de Noël étaient propices à des ventes massives. Seuls présents sur les marchés européens, les litchis bateau de Madagascar ne rencontraient pas de concurrence, ce qui favorisait des ventes à des prix plus attractifs que ceux des litchis avion encore disponibles.

Le chargement du second navire conventionnel s’effectuait dans la continuité du premier, mais s’avérait plus laborieux en raison de multiples arrêts des opérations dus à des précipitations nécessitant la fermeture temporaire des cales du bateau. Complétant sa cargaison avec des conteneurs en pontée, ce second navire prenait finalement la mer le 26 novembre. Il était réceptionné à Zeebrugge le mercredi 16 décembre. Les litchis étaient déchargés et stockés sur place pour assurer le réapprovisionnement des distributeurs pour la période du nouvel an.

Lors des dernières campagnes, la cargaison du second navire permettait d’alimenter les marchés après Noël et de faire la soudure avec les premiers arrivages de litchis transportés par conteneurs, généralement réceptionnés en fin de première décade de la nouvelle année. Ce schéma ne s’est pas reproduit dans les mêmes termes cette fois-ci. Si la commercialisation de la cargaison du premier navire a été assez rapide, celle du second a été plus lente. La baisse de la demande après Noël a été plus marquée que d’habitude. La bonne tenue des fruits a alors été essentielle pour ne pas entraîner d’importantes pertes. La demande ne cessait de fléchir en dépit de la qualité satisfaisante des litchis, des prix attractifs pratiqués et d’une 53e semaine du calendrier qui allongeait la période de commercialisation.

L’offre s’amplifiait avec l’arrivée des litchis par conteneurs réceptionnés les 9 et 18 janvier, qui alourdissaient les stocks, et avec le développement des livraisons d’Afrique du Sud parvenues à leur apogée. Le léger rebond des cours, traditionnellement observé lors de la mise en marché des premiers litchis par conteneurs, ne s’est pas produit cette année. Les prix se sont infléchis de façon linéaire et continue. Le repli de la demande affectait les ventes des litchis de Madagascar mais également d’Afrique du Sud, de plus grande fraîcheur et de calibre globalement supérieur. Le lancement de promotions à la mi-janvier pour tenter de relancer la consommation faisait long feu et les perspectives d’une dynamisation des conditions de marché pour la célébration du nouvel an chinois s’avéraient décevantes. Certes, quelques enseignes poursuivaient la vente du produit, mais les marchés extérieurs se refermaient définitivement et les stocks encore conséquents se distillaient lentement sur le seul marché français, devenu exigu.

La fin de campagne s’est effectuée difficilement dans une ambiance morose où le spectre du cycle mévente/dégradation qualitative/baisse des cours des mauvaises années est revenu planer sur cette dernière période de commercialisation.

litchi bateau de madagascar - evolution des arrivages en europe
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litchi bateau de madagascar - evolution du prix import moyen en france
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Bilan toujours positif, mais le calibrage reste à améliorer

Au total, le bilan économique de cette campagne a bien été positif, mais vraisemblablement moins profitable pour les intervenants de la filière. Péché d’orgueil d’avoir cru possible une progression des tonnages ? Cela ne semble pas être le cas, sachant que les résultats des précédentes campagnes incitaient plutôt au développement et qu’ils étaient bien inférieurs aux 24 000 tonnes de 2008-09. Peut-être l’oubli d’une situation économique toujours en crise et qui finit par se fondre dans une certaine routine ? Toujours est-il que le déroulement de cette campagne nous rappelle que les capacités d’absorption du marché européen pour le litchi de Madagascar semblent encore figées autour de 17 000 tonnes.

On retiendra également l’exceptionnelle tenue des fruits dans le temps sans que, là encore, une explication rationnelle soit apportée. L’amélioration de la valorisation des litchis de Madagascar à l’avenir ne viendrait-elle pas d’une recherche axée sur la qualité des fruits et notamment leur taille ? Cet élément demeure la principale critique des distributeurs et des consommateurs. Pour l’instant gommé par les niveaux de prix attractifs des litchis bateau, il devrait pourtant inciter les professionnels à chercher des remèdes, notamment pour la période avion et pour la fin de campagne. Ne pourrait-on reproduire les efforts consentis dans le domaine sanitaire ou dans celui de la certification bio ou commerce équitable afin d’améliorer le calibrage des fruits ?

litchi - calendrier importation
litchi - calendrier importation
litchi - imports UE
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