Marché européen de la mangue

  • Publié le 6/04/2016 - Elaboré par Cirad-Persyst
  • FruiTrop n°239 , Page 40 à 45
  • Gratuit

Un marché en expansion, mais soumis à des contraintes phytosanitaires

La campagne de commercialisation de la mangue a été assez satisfaisante en 2015, si l’on en juge par l’augmentation des volumes importés et le niveau des prix pratiqués. Certes, l’approvisionnement, bien qu’en hausse, s’est avéré ponctuellement difficile avec le retard de telle origine, la fin de campagne précoce de telle autre ou le chevauchement des volumes de deux pays fournisseurs majeurs. Mais pour autant, les mangues n’ont jamais disparu des linéaires des distributeurs. Quant aux prix de vente, là encore, hormis quelques crises assez limitées dans le temps, ils ont été plutôt soutenus et en progression.

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Reprise aux États-Unis

La consommation de mangue aux États-Unis est repartie à la hausse en 2015, après un recul conjoncturel en 2014 qui semble lié à la baisse de production de son principal fournisseur, le Mexique, affecté par des conditions climatiques désastreuses. En effet, cette origine a retrouvé son positionnement traditionnel. Si d’autres pays ont réduit leurs envois vers les États-Unis, comme le Pérou avec un recul notable de 11 000 tonnes, ou le Guatemala (- 5 000 t), ces défaillances ont largement été compensées par l’augmentation des exportations du Brésil (+ 10 000 t), d’Équateur (+ 4 000 t) et plus modestement d’Haïti, des Philippines et d’origines secondaires progressant chacune d’un millier de tonnes.

La consommation aux États-Unis s’appuie sur la forte population d’origine latino-américaine qui connaît le produit et l’achète régulièrement. Mais cette frange de consommateurs acquise n’explique pas l’importance des volumes importés et distribués. En effet, il existe une dynamique de communication autour du produit qui s’adresse à tous les publics. Des fonds promotionnels sont mobilisés pour une communication au travers des grands médias, mais aussi d’actions plus ciblées autour d’événements sportifs, dans les écoles, etc. Une recherche rapide sur internet permet d’apprécier l’ampleur des actions entreprises par les professionnels pour vanter la mangue. Ce type d’opération et d’organisation est similaire à celui développé pour l’avocat, qui a accompagné l’explosion de sa consommation.

mangue - evolution des importations aux USA et UE
mangue - evolution des importations aux USA et UE

Le marché européen poursuit sa progression

Avec 290 000 tonnes importées (incluant l’Espagne) en 2015, le marché européen poursuit sa progression, mais à un rythme plus lent. Plus morcelé que celui des États-Unis en termes de circuits de distribution et d’habitudes alimentaires, le marché européen s’ouvre de plus en plus à la mangue, avec une segmentation différente et un manque évident de communication. Les marchés traditionnels restent toujours les mêmes et ils constituent encore la locomotive européenne de la consommation de mangue. Le contexte économique ne favorise pas particulièrement le développement du fruit et, pourtant, les importations augmentent. On peut imaginer que la consommation également. Les aléas de production dans certains pays fournisseurs ont affecté ponctuellement l’approvisionnement mais, globalement, les origines les plus importantes accroissent leur part de marché. Ainsi, le Brésil, malgré un démarrage tardif de sa campagne d’hiver de Kent, a augmenté ses livraisons de 12 000 t. Immédiatement derrière, le Pérou a expédié 6 000 t de plus qu’en 2014. La Côte d’Ivoire, la République dominicaine et le Mali ont conforté leurs parts de marché en augmentant leurs exportations de 2 000 à 2 500 t chacun. Plus modestement, le Pakistan revient sur le marché après un important recul pour raisons phytosanitaires, avec une progression d’un millier de tonnes, au même titre que le Sénégal et le Mexique. Seuls Israël et Porto Rico ont vu leurs expéditions se rétracter de 2 000 et 4 000 t respectivement.

En termes économiques, l’année 2015 a été visiblement plus profitable. Sans tenir compte de l’éventuelle augmentation des prix de revient des marchandises, ni des variations des taux de change, les prix de vente ont été globalement supérieurs à ceux de l’année précédente, dans un contexte de développement des volumes mis en marché. La comparaison, peut-être hasardeuse, d’un prix de vente moyen pour les mangues Kent acheminées par bateau, toutes origines confondues sur le marché français, fait apparaître un écart de plus de 2.00 euros/colis entre 2014 et 2015. En 2015, les périodes de cours bas (inférieurs à 4.00 euros/colis de moyenne) se sont produites à deux reprises en juin et en décembre et n’ont duré qu’une quinzaine de jours. En 2014, ces périodes sont apparues également à deux reprises, mais se sont prolongées davantage, de trois semaines à un mois et demi avec des cours moyens de 3.00 euros/colis. A l’inverse, les périodes de prix moyens supérieurs à 7.00 euros/colis se sont reproduites à trois reprises en 2015, sur des amplitudes supérieures à un mois, contre seulement deux périodes en 2014 sur de courtes durées. Outre le fait que cet indicateur montre la bonne santé du secteur, il illustre la capacité d’absorption d’une augmentation des prix assumée in fine par le consommateur. Les éléments clé de cette progression sont vraisemblablement une meilleure diffusion du produit et des améliorations qualitatives, avec notamment le développement des fruits prêts à consommer.

Le spectre de la mouche du fruit

En dépit d’une chute entre 2014 et 2015 des saisies de lots de mangue par les services phytosanitaires des Etats membres de l’UE, pour infestation par la mouche du fruit, ce problème qualitatif reste préoccupant. La saisie et la destruction des lots infestés affectent fortement les entreprises d’exportation confrontées à cet obstacle. Elles peuvent remettre en cause la rentabilité d’une campagne d’exportation, notamment pour les structures de taille modeste qui perdent le gain d’une ou plusieurs expéditions (marchandises, emballages, coût du transport mais aussi frais liés à la destruction du lot).

mangue - UE - nombre saisie pour cause de mouche du fruit en 2014 et 2015
mangue - UE - nombre saisie pour cause de mouche du fruit en 2014 et 2015

Les pays producteurs et exportateurs d’Afrique de l’Ouest sont particulièrement concernés par ce problème, vu le nombre de saisies réalisées. Les actions de lutte paraissent encore ponctuelles et peu coordonnées dans cette importante zone de production, malgré la mise en place de programmes régionaux qui n’ont pas jusqu’ici prouvé une grande efficacité. Certes, le problème est complexe, mais la diminution impressionnante du nombre de saisies pour la Côte d’Ivoire tend à montrer qu’un plan de lutte peut influer positivement sur cette pression parasitaire. Le renforcement de la surveillance et les avertissements de l’Union européenne à l’égard de la Côte d’Ivoire fin 2014 en sont un exemple patent. La mobilisation des pouvoirs publics du pays, des opérateurs de la filière et l’intervention d’organismes d’appui se sont bel et bien traduites par la réduction du nombre de saisies en Europe, même si le problème n’est pas résolu pour autant.

La réglementation européenne contre l’introduction sur son territoire d’organismes nuisibles, listés dans l’annexe de la directive 2000/29/CE du Conseil (et mises à jour postérieures) incluant les différentes mouches du fruit non-européennes, apparaît quelque peu hypocrite. Elle implique la destruction pure et simple du lot contaminé. Il n’existe donc aucune échappatoire, la responsabilité étant rejetée sur l’expéditeur. Effectivement, nul n’est censé ignorer la loi !

Le système américain est tout autre, même si les interdictions sont de même nature. L’administration américaine est d’autant plus vigilante à l’égard des organismes nuisibles comme la mouche du fruit qu’elle se doit, à l’instar de son homologue européenne, de protéger les cultures fruitières nationales. Mais la réglementation américaine va plus loin que celle en vigueur en Europe. Elle exige, en effet, que les mangues importées sur son territoire aient subi un traitement thermique garantissant l’absence de parasites dans le produit. Pour cela, chaque station de conditionnement des pays fournisseurs se voit imposer la présence d’un représentant de l’USDA chargé de contrôler la mise en œuvre du traitement exigé. En conséquence, les lots de mangue sont importés sans contrôle sur le territoire américain. La seule question que pose ce système, au-delà des lourds investissements requis, réside dans la qualité intrinsèque du produit. Le traitement thermique appliqué n’entraîne-t-il pas des dégradations lors de l’évolution physiologique du fruit ? La progression des volumes importés par les États-Unis semble l’infirmer, à moins que les consommateurs américains soient habitués à déguster des fruits de comportement et de structure différents de ceux distribués en Europe.

Les réglementations en vigueur sur les différents continents ne sont pas appelées à être modifiées. Mais leur comparaison peut inspirer les opérateurs. Il conviendrait peut-être que les intervenants des filières, notamment africaines, étudient de façon plus approfondie et plus pérenne les méthodes les mieux adaptées pour lutter contre les pressions parasitaires, qui entravent les flux commerciaux.

mangue kent avion - france - prix import en 2015
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mangue kent bateau - france - prix import en 2015
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