Melon de contre-saison

  • Publié le 16/02/2018 - Elaboré par BENOIT-CELEYRETTE Cécilia
  • FruiTrop n°254 , Page 44 à 48
  • Gratuit

Bien jouer le jeu !

Le développement du rayon semble se confirmer ces dernières années avec une hausse régulière et conjointe des importations de melon et de pastèque. Et si l’Amérique latine domine ce marché avec principalement le Brésil, les pays méditerranéens voire africains, dont la distribution se renforce, montrent également quelques belles aptitudes.

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Enclenchée depuis déjà deux ans, la reprise de la consommation de melon s’est confirmée au cours de la campagne 2016-17 avec l’évolution de la gamme, entre déclinaison variétale (Charentais, Cantaloup, Galia, Piel de Sapo, Canari ou Honeydew) et élargissement à la pastèque. Après une hausse de 4 % en 2015-16, les importations communautaires ont progressé de 10 % lors de la dernière saison pour atteindre près de 380 000 t. Le développement se poursuit également en pastèque de contre-saison avec des ventes qui ont doublé en l’espace de cinq ans (209 700 t, soit + 13 % par rapport à 2015-16), mues par une nouvelle poussée des principales origines, notamment le Maroc et le Brésil, les autres pays fournisseurs semblant embrayer le pas (Sénégal, Costa Rica, etc.).

Le Brésil occupe le terrain

Le Brésil mène toujours la danse en période de contre-saison, même si la filière se trouve actuellement confrontée à plusieurs difficultés, dont la première est la ressource en eau, très restreinte ces dernières années par une sécheresse récurrente depuis 2011 qui réduit les rendements. De plus, les productions sont impactées par l’augmentation de la teneur en minéraux des réserves hydrologiques. Pourtant, les opérateurs étaient confiants cette année avec une Niña qui laissait espérer le retour des pluies. Mais, en dépit de ces précipitations, les réserves n’ont pas pu être rechargées et la salinisation de l’eau des puits a obligé les producteurs à limiter les surfaces, y compris les plus grosses entreprises du secteur qui poursuivaient jusqu’à présent leur développement.

Par ailleurs, même si les exportations sont restées d’un bon niveau avec le maintien des standards de qualité pour l’export, la concentration des volumes en fin d’année conduit toujours à la formation de stocks importants à partir de novembre, avec pour conséquence des prix très bas qui ont eu bien du mal à remonter avant courant janvier en 2016-17. L’échelonnement du calendrier de plantation permet toutefois au marché de progressivement se décanter avec l’étalement de la campagne jusqu’à début mars. En revanche, le prolongement de la campagne brésilienne limite la pénétration des autres origines, que ce soit le Honduras ou le Costa Rica dont les campagnes débutent entre mi-décembre et début janvier et se terminent en avril. La fenêtre d’importation en Europe de ces origines se trouve donc réduite, sans compter le développement de plus en plus précoce de l’Espagne et du Maroc qui déploient des productions sous serres dès mars-avril. Les exportations globales ont donc baissé pour le Costa Rica (111 000 t en 2016-17, soit - 10 % par rapport à 2015-16), avec une diminution des envois vers le marché européen mais également vers le marché américain. Le Honduras résiste mieux de par la forte volonté des opérateurs de développer les exportations, y compris vers d’autres marchés comme l’Asie où l’origine a d’ailleurs décroché cette année le droit de commercialiser des melons dès le mois de décembre (Taïwan).

melon - UE28 - import extra UE
melon - UE28 - import extra UE

Le Sénégal marque des points

Les difficultés de fin d’année sont également liées à une baisse de la consommation sur le créneau festif avec le développement de nombreux exotiques, entraînant la diminution du nombre d’origines, voire la disparition de certaines comme Israël. Par exemple, les quantités sont très réduites pour le Maroc, avec seulement quelques hectares plantés dans le cadre d’une rotation des cultures, et très peu de volumes sont réceptionnés en provenance des Antilles (essentiellement Saint Domingue), du fait d’une météo trop souvent perturbée à cette période.

Néanmoins, d’autres origines comme le Sénégal prennent part au banquet. Car, si peu d’opérateurs étaient présents sur le créneau il y a encore cinq ans, leurs essais concrétisés par des volumes croissants ont séduit davantage de metteurs en marché, qui ont tenté cette année l’expérience pour les fêtes. Le développement a surtout été marqué en France où les volumes ont doublé en fin d’année, passant de 400 t entre novembre et décembre en 2011 à  plus de 800 t en 2016. Ils se déploient également fortement au printemps en mars/avril et ont été multipliés par cinq en cinq ans (2 500 t en 2017 contre 500 t en 2012). Le développement est un peu moins visible au niveau européen, mais toutefois tangible puisque les importations de melon du Sénégal sont passées de 12 000 t en 2012-13 à 14 400 t en 2016-17. Cet essor est également la conséquence de la politique menée par le gouvernement sénégalais, résolu à faire de l’horticulture un des piliers du développement dans le cadre du Programme d’accélération de la cadence de l’agriculture sénégalaise (Pracas), qui s’inscrit dans la ligne du Plan Sénégal émergent (PSE).
L’un des objectifs du Pracas est d’atteindre l’autosuffisance pour un certain nombre de produits (par exemple les oignons, avec un objectif annuel de 350 000 t) et de porter les fruits et légumes de contre-saison destinés à l’exportation à 157 500 t dès 2016-17. Le Sénégal a pour cela reçu un soutien technique du FMI qui a investi dans 19 projets entre 2015 et 2017, dont la modernisation des infrastructures, notamment l’autoroute Thiès-Touba et l’aéroport Mbour-Thiès, ou l’augmentation de la capacité annuelle de production d’électricité. La montée en puissance de cette origine pourrait toutefois faire de l’ombre à la production des Antilles françaises, qui se maintient encore en France de janvier à avril (3 000 t), portée pour l’instant par la préférence nationale mais dont la valorisation pourrait être menacée.

Le Maroc « re-serre » les rangs

Si le Maroc a déserté le créneau hivernal, il semble avoir retrouvé quelques couleurs au printemps en 2017, avec une campagne assez favorable qui conforte les évolutions de ces dernières saisons. Le marché est, en fait, mieux maîtrisé avec moins d’opérateurs qui peuvent, en étant présents dans la plupart des zones de production, gérer plus globalement le calendrier de commercialisation. Cependant, ils ne ciblent ni une trop grande précocité, faute souvent de demande, ni un prolongement de la campagne pour éviter le télescopage avec l’Espagne. Les premiers volumes ont donc été commercialisés l’an dernier vers mi-février, mais le réel début de saison de la zone de Dakhla s’est plutôt situé début mars. Le premier pic de production a eu lieu dans le courant du mois et le plein potentiel fin mars, ce qui a suffi à contenter la demande compte tenu des conditions climatiques du moment. Le développement de l’offre en avril reste encore difficile à maîtriser en dépit du déploiement des surfaces sous serres dans la zone de Marrakech. Le relais entre la fin de la zone de Dakhla et la production de plein champ sur Marrakech demeure souvent délicat. Il s’est encore traduit, durant la dernière campagne, par un creux de production pendant les fêtes pascales, tandis que le pic de production en plein champ sur Marrakech est souvent très fort, déstabilisant le marché courant avril/début mai avant de se télescoper avec la production sous serre espagnole qui tend à se renforcer. Les surfaces se sont stabilisées l’an dernier, tout au moins sur Dakhla (plus de 250 ha) et globalement sur Marrakech (1 000 ha) d’après les chiffres annoncés au Medfel. Seule la zone d’Agadir/Taroudant enregistrait encore une baisse (100-150 ha).  

Que la pastèque entre en jeu !

Si le développement des volumes de melon s’explique par une meilleure maîtrise du marché et le déploiement au sein de l’espèce melon ( Cucumis melo) de toute une gamme avec des melons jaunes de type Canaris ou des melons verts, en complément des plus traditionnels Cantaloup, Charentais, Piel de Sapo ou Galia, il faut également souligner l’impact de l’élargissement aux pastèques ( Citrullus lanatus). Les fournisseurs sont d’ailleurs les mêmes, avec un classement un peu différent, le Maroc, où la production a littéralement explosé ces dernières années, arrivant en tête. Les exportations, encore faibles il y a quelques années, ont été multipliées par dix en l’espace de seulement cinq ans avec la plantation dans des zones plus précoces permettant de fournir le marché dès le printemps. La production s’est ainsi délocalisée des régions du centre et du nord (Tanger, Tétouan, Gharb, Doukkala, Rabat-Salé) vers les régions plus au sud (Tadla et Sous et Haouz), qui représenteraient désormais 56 % des surfaces. Le développement est moins marqué pour les autres origines méditerranéennes ou africaines, mais il est fort pour les grandes origines latino-américaines comme le Brésil (+ 137 % en cinq ans) et le Costa Rica (+ 48 %).

melon et pasteque - UE28 - import extra UE
melon et pasteque - UE28 - import extra UE

Cécilia Céleyrette, consultante
c.celeyrette@infofruit.fr

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