Campagne ananas par bateau en 2014-2015

  • Publié le 6/11/2015 - Elaboré par PAQUI T.
  • FruiTrop n°236 , Page 42 à 47
  • Gratuit

Un besoin de périodicité pour le Sweet

La campagne ananas (décembre 2014 à septembre 2015) a été exceptionnelle à plus d’un titre. Les prix, tout d’abord, ont atteint des sommets depuis longtemps oubliés et, ensuite, l’offre latino-américaine a été assez faible à certains moments sur le marché européen. Ces deux éléments, soutenus en début d’année par une quasi-parité du dollar et de l’euro, ont permis des ventes à des cours moyens supérieurs à 10 euros le colis sur une période relativement longue. Malgré ces bons résultats, les opérateurs restent sceptiques car ils n’ont eu aucune maîtrise sur ces éléments. N’y a-t-il pas un juste milieu à trouver entre une offre latino-américaine excessive et les capacités d’absorption du marché ? Au moment où le cap du million de tonnes d’ananas importées en Europe va être franchi, ne peut-on redynamiser le marché en redonnant une certaine saisonnalité ou périodicité à l’ananas ?

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A l’exception de la précédente campagne (octobre 2013 à novembre 2014), où les prix moyens avaient fluctué entre 5.50 et 7.50 euros/colis, les cours du Sweet ont été relativement stables ces dernières années, entre 6.00 et 8.00 euros/colis selon les calibres. Chaque campagne a connu des périodes d’activité plus ou moins dynamiques, qui ont permis aux opérateurs de pratiquer des prix supérieurs ou inférieurs à ces moyennes. Durant la dernière campagne (semaine 49 de 2014 à semaine 40 de 2015), on a assisté à une belle remontée des cours, qui se sont situés entre 7.00 et 9.50 euros/colis. Pendant les périodes de forte demande, les cours ont atteint et même dépassé la barre des 11 euros/colis ! Il y a longtemps que les petites marques n’avaient pas été à telle fête.

ananas bateau Sweet - allemagne - prix import
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ananas bateau - UE - prix import
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Un Costa Rica moins flamboyant

Encore une fois, la commercialisation des ananas en Europe s’est faite au rythme de l’offre latino-américaine et plus particulièrement de celle du Costa Rica. Sur un marché européen qui a importé 934 593 t d’ananas en 2014, le Costa Rica a représenté plus de 87 % avec 817 317 t.

A plusieurs reprises au cours des dix derniers mois, l’offre de Sweet du Costa Rica a été moins importante sur le marché européen. En effet, les inondations, qui ont frappé le pays à plusieurs reprises, ont gêné ou retardé les exportations et ont également eu un impact sur la production en empêchant les producteurs de planter ou tout simplement en détruisant une partie des plants. De plus, l’attractivité du marché nord-américain, surtout en début d’année, a été soutenue, non seulement par une bonne demande mais également par le cours du dollar qui était, du moins en mars et avril, sensiblement égal à celui de l’euro. En effet, avec une rémunération du colis équivalente sur les deux marchés, les frais d’approche moindres pour les États-Unis ont contribué à la réduction des volumes envoyés vers les marchés européens.

Des prix qui s’envolent quand les volumes s’allègent

Au cours de la campagne précédente, plusieurs importateurs, vu leurs pertes, s’étaient interrogés sur la manière dont ils travaillaient avec leurs fournisseurs du Costa Rica. Ils envisageaient de réduire leurs importations pour les adapter un peu plus aux attentes du marché dans l’espoir de voir remonter leurs prix. Ce choix de la réduction des volumes pour stabiliser et remonter les cours, quand il est basé sur une offre de qualité, a déjà montré son efficacité, notamment pour la Compagnie Fruitière, premier exportateur de Sweet d’Afrique, qui a recentré sa production sur deux pays, la Côte d’Ivoire et le Ghana. De même, depuis fin 2014, Del Monte a choisi de réduire ses exportations vers l’Europe dans l’optique de stabiliser et remonter ses prix.

Les prix moyens relativement élevés du Sweet pratiqués au cours des dix derniers mois semblent indiquer que la piste mérite d’être creusée. Si tous les opérateurs s’accordent à reconnaître que le marché a souvent manqué de fruits sur la période, ils admettent également que la demande a été très rarement au rendez-vous. En effet, beaucoup pensent que les cours se seraient certainement effondrés si l’offre avait été un peu plus importante. En d’autres termes, la faible demande aurait eu du mal à absorber des volumes plus conséquents. C’est donc davantage la faiblesse de l’offre qui a permis d’entretenir la hausse des prix. Parallèlement, les volumes absorbés par le marché européen continuent de progresser.

Malgré le niveau relativement élevé des cours, les opérateurs n’ont cessé de tirer le signal d’alarme car la demande ne suivait pas. En effet, malgré une offre parfois limitée, la demande a souvent été mitigée, sans réelle période d’engouement, bien au contraire. C’est d’ailleurs ce qui a le plus inquiété les opérateurs, la faiblesse de la demande et le fait qu’elle ne se dynamise que de plus en plus tard aux moments clés de la campagne, comme Pâques et la fin de l’année.

ananas bateau Sweet du costa rica - allemagne - prix import
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ananas bateau Sweet du costa rica - belgique - prix import
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ananas bateau Sweet du costa rica - pays-bas - prix import
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Des opérations de promotion annulées

L’ananas, fruit exotique devenu produit de masse, est à jamais lié aux circuits de commercialisation de la grande distribution, en dehors desquels il est difficile, pour ne pas dire pratiquement impossible, de commercialiser les volumes importés en Europe. Ce fruit est devenu un produit d’appel indispensable pour ces chaînes et il est donc nécessaire de mieux organiser leur approvisionnement.

Au cours de la campagne écoulée, plusieurs opérateurs, engagés dans des opérations de promotion préalablement cadrées, ont eu des difficultés à respecter leurs engagements car l’offre était très réduite. Les ananas ont ainsi fait l’objet parfois de ventes spéculatives à prix fort. A certain moments de la campagne, l’offre était si basse que certains ont tenté, avec plus ou moins de réussite, de renégocier les accords.

Deux conséquences ont résulté de cette hausse des cours. Les hard discounteurs allemands (Aldi notamment) ont purement et simplement annulé des opérations prévues au motif qu’ils craignaient de ne pas pouvoir se procurer les volumes nécessaires. Qu’elle soit vraie ou pas, cette explication donne à réfléchir sur le prix que ces opérateurs incontournables sont prêts à payer dans ces conditions. Dans d’autres cas, même si cette hausse des prix a été acceptée par les GMS, elle a donné lieu à un ralentissement des sorties en magasins, les fruits au détail étant devenus trop chers. Ce ralentissement a également eu des répercussions sur la fluidité des volumes importés.

Une réduction des volumes pour une meilleure valorisation ?

La réduction de l’offre de Sweet au cours des derniers mois a été conjoncturelle. Ne pourrait-on pas envisager des changements plus structurels pour déterminer l’approvisionnement du marché européen ? Quelle solution proposer pour absorber les fameux fruits de la floraison naturelle qui, chaque année, arrivent sur les marchés en volumes conséquents et entraînent des chutes catastrophiques de prix ?

Les opérateurs du Costa Rica comme les importateurs perdent de l’argent quand le marché est surapprovisionné. Certains pensent qu’une réduction de l’offre de 25 à 30 % (ce qui correspond à peu près à la situation actuelle du marché) devrait contribuer à améliorer la commercialisation des ananas. Mais personne ne veut vraiment faire le premier pas ou risquer de perdre des fournisseurs en réduisant le volume de ses importations. Si les producteurs latino-américains veulent obtenir une meilleure valorisation de leurs ananas, ils doivent accepter de jouer le jeu en évitant de surcharger le marché quand il est saturé.

Il est difficile de parler de saisonnalité d’un fruit disponible tout au long de l’année. Toutefois, ne pourrait-on pas envisager d’accentuer l’offre à certaines périodes de l’année, comme c’était le cas autrefois : de novembre à décembre et de mars à juin. Cette solution s’appliquerait bien entendu aux fruits prévus et non à ceux de la floraison naturelle qui, de par leur importance et leur caractère erratique, devraient faire être considérés comme une réserve potentielle des importateurs tant ils perturbent l’organisation du marché. Les importateurs pourraient alors les utiliser en fonction de la demande sur le marché européen. Mais il s’agit là bien sûr d’un vœu pieu qui a peu de chances de se réaliser.

Moments clés de la campagne 2014-15

Semaine 49 de 2014 à semaine 2 de 2015

La période des fêtes de fin d’année, habituellement favorable au marché de l’ananas, a été compliquée à plus d’un titre. Les opérateurs s’attendaient à être pris d’assaut au cours des trois premières semaines de décembre car des opérations de promotion étaient prévues. Mais ça n’a pas été le cas, bien au contraire. Malgré une offre plutôt limitée, les ventes en magasins n’ont pas suivi, l’ananas ne suscitant que très peu d’intérêt. La demande est restée atone tout au long du mois. Des stocks se sont progressivement constitués, avec des lots de resserre qui, semaine après semaine, compliquaient un peu plus la commercialisation des lots d’arrivage. Les exportations vers les marchés de l’Est (Russie notamment) étaient à l’arrêt. En effet, la dévaluation du rouble en fin d’année rendait inintéressante et périlleuse toute exportation vers ce marché. Le déclenchement de la grève générale en Belgique (15 décembre) n’a pas non plus facilité la commercialisation des ananas en fin d’année 2014. Très vite, le marché a été engorgé. Afin d’éviter de se retrouver avec des stocks en début d’année, au moment où la demande est généralement très faible, les opérateurs ont eu recours à des ventes de dégagement.

Le cours moyen en dehors de ces ventes s’est situé entre 6.00 et 7.50 euros/colis, laissant les opérateurs peu confiants en l’avenir. Par ailleurs, à la fin de cette période, l’information selon laquelle l’offre de Sweet du Costa Rica serait basse a commencé à circuler.

Semaines 3 à 22 de 2015

L’offre de Sweet du Costa Rica a progressivement diminué jusqu’au sous-approvisionnement. Plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, un problème d’allocation du fret : les exportations de melon du Costa Rica ont pris le pas sur celles d’ananas. Ensuite, les fortes pluies au Costa Rica ont limité considérablement les disponibilités. Ce déficit a provoqué une hausse des prix, plus particulièrement pour les gros calibres moins disponibles. Elle a débuté en février, généralement calme en termes de demande, et s’est poursuivie jusqu’à fin mars, à la veille de Pâques.

Par ailleurs, le marché nord-américain était dynamique alors que le marché européen, dont les coûts d’approche sont plus élevés, était moins attractif du fait de la quasi-parité euro-dollar. Juste après Pâques, l’arrivée de volumes un peu plus conséquents de Sweet a fait craindre une rapide chute des prix, d’autant que la période coïncidait avec le démarrage des congés scolaires. Toutefois, l’offre était encore assez réduite pour permettre de stabiliser la baisse des cours, tout en maintenant un niveau de prix relativement soutenu. Fin mai, les premiers fruits d’été, malgré leur prix élevé, ont entraîné une réduction de la demande pour l’ananas, obligeant les opérateurs à progressivement adapter leurs prix. Au cours de la semaine 21, Aldi a annulé une série d’opérations de promotion sur les ananas.

Les cours moyens du Sweet ont varié entre 7.00 et 12.00 euros/colis, et ont été au plus haut au cours des semaines 8 à 13, entre 10 et 12 euros/colis.

Semaines 23 à 29 de 2015

L’offre de fruits de saison, à des prix encore élevés, a capté l’essentiel de la demande. Ayant de plus en plus de mal à écouler leurs lots, les opérateurs ont réagi en baissant leurs prix dans l’espoir de fluidifier les ventes. Le manque d’intérêt pour le fruit est survenu au moment où arrivaient des ananas issus de la floraison naturelle qui, heureusement, s’est avérée plus courte que prévu. Ces volumes imprévus ont entraîné une chute des cours qui a affecté tous les opérateurs, même ceux des marques établies comme Del Monte et Dole qui se sont retrouvées avec trop de fruits à mettre en marché. Les ventes restant au point mort, plusieurs lots ont été proposés en PAV (prix après vente).

Bien que les cours moyens se soient situés entre 4.5 et 7.00 euros/colis, plusieurs ventes de dégagement ont été effectuées à des prix bien inférieurs. Malgré les fortes pluies qui ont entraîné à un moment la fermeture du port de Limon au Costa Rica, la situation est restée critique.

Semaines 30 à 40 de 2015

L’offre de Sweet en provenance du Costa Rica a progressivement diminué, contribuant à stabiliser le marché et à le réorienter à la hausse. Malheureusement, comme au cours des mois précédents, l’offre réduite n’a pas été soutenue par la demande qui, en été, est surtout captée par l’abondance des fruits de saison. De plus, l’absence d’une partie des opérateurs en vacances se ressent également sur les ventes.

Si la fin des vacances scolaires s’est traduite par une légère amélioration des ventes, la demande ne s’est jamais totalement repositionnée sur l’ananas du fait de lots résiduels de fruits de saison. L’offre de Sweet a également été majoritairement constituée de petits fruits, qui entraient davantage en concurrence avec les fruits d’été. Ainsi, les gros calibres se sont mieux valorisés, mais la demande est restée mitigée

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