Campagne mangue en 2015 : bilan par origine

  • Publié le 7/04/2016 - Elaboré par GERBAUD Pierre
  • FruiTrop n°239 , Page 46 à 64
  • Gratuit

Des origines en développement

Comment va le marché de la mangue ? Bien, merci. Les bonnes nouvelles sont assez rares dans le contexte économique morose actuel pour que nous le soulignions. La progression continuelle des volumes commercialisés en Europe et en Amérique du Nord et les prix pratiqués tout au long de l’année semblent le confirmer. L’Europe importe toujours plus de mangue et totalise en 2015, si l’on ajoute l’Espagne aux origines extra-communautaires, plus de 290 000 tonnes. Le seuil des 300 000 t devient atteignable. L’Amérique du Nord progresse toujours avec 460 000 t importées, pour une population moindre. Le marché européen serait-il donc toujours attractif pour ce produit, avec de nouvelles opportunités d’accroissement ?

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Brésil : encore plus fort !

Alors que certaines rumeurs laissaient entendre que la production du Brésil et, par conséquent, ses exportations vers l’Europe fléchissaient, on ne peut que constater qu’il n’en est rien. Bien au contraire, l’origine participe grandement au développement général des volumes vers les marchés européens. Oscillant entre 85 000 et 95 000 t exportées ces dernières années, le Brésil semble passer à la vitesse supérieure. En 2014, il frôlait les 100 000 t exportées vers l’Union européenne. En 2015, il pulvérise une nouvelle fois ses réalisations, en atteignant 111 500 t, soit plus du tiers des mangues commercialisées en Europe. Ce record est à souligner car, parallèlement, il a approvisionné les marchés nord-américains avec 10 000 t de plus que l’année antérieure. Si l’on ajoute à cela le dynamisme de son marché intérieur, qui absorbe non seulement des variétés locales mais aussi de plus en plus de variétés d’exportation, on ne peut que supposer la bonne santé du secteur brésilien.

 

mangue - bresil - evolution des exportations par variete
mangue - bresil - evolution des exportations par variete

Diversification variétale

La Tommy Atkins est restée, en 2015, la variété la plus couramment exportée par les opérateurs brésiliens. Les méthodes culturales, sa productivité, son adaptation aux conditions pédoclimatiques du pays, sa bonne coloration et sa bonne tenue au transport favorisent son exportation tout au long de l’année. Mais son manque de saveur et sa chair plus ou moins fibreuse font que d’autres variétés lui sont préférées. Ainsi, depuis quelques années, on observe une mutation du verger brésilien vers des variétés sans fibre, qui s’est effectuée rapidement si l’on se réfère aux six dernières campagnes. Les Tommy Atkins, qui représentaient encore près de 75 % des mangues exportées du Brésil vers l’Europe en 2010, ne composaient plus que 36 % des envois en 2015. La variété phare du Brésil aurait donc diminué de moitié durant cette période.

En revanche, les autres variétés dites « sans fibres », marginales en 2010 avec un maximum de 10 % des volumes exportés, se sont considérablement accrues. Les Kent sont passées de 8.8 % en 2010 à 22.0 % en 2015, les Keitt de 10.2 % à 21.2 % et les Palmer de 5.6 % à 20.3 %. Autrement dit, les variétés « sans fibres » représentent aujourd’hui près des deux tiers des exportations brésiliennes. Cette reconversion variétale a été incitée par la demande des acheteurs européens. Les expéditions vers les États-Unis sont, en effet, restées très majoritairement composées de Tommy Atkins. Le traitement thermique exigé par les autorités sanitaires américaines n’y est peut-être pas étranger, la variété résistant sans doute mieux à ce choc physiologique.

mangue - bresil - repartition varietale des exports vers UE en 2015
mangue - bresil - repartition varietale des exports vers UE en 2015

Variations de prix au gré des approvisionnements

La période où les variétés exportées sont les plus diverses correspond aux flux les plus importants de septembre à décembre, quand les Tommy Atkins connaissent leur plus bas niveau, alors que se développent les envois de Palmer, Keitt et Kent. Cette dernière variété est la plus concentrée dans le temps, entre octobre et début janvier. L’apparition massive de volumes de Kent en octobre influe sur les prix qui fléchissent généralement, entraînant ceux des deux autres variétés qui se déprécient tout aussi rapidement et souvent à des niveaux inférieurs. En quelques années, la Tommy Atkins a été reléguée au rang de variété d’appoint. Néanmoins, elle demeure importante dans le calendrier général du Brésil, lui permettant d’être présent douze mois sur douze sur les marchés européens.

Si le cours des Kent s’est effondré en fin d’année du fait des importants volumes expédiés sur une courte période et du démarrage précoce de la campagne péruvienne, celui des Tommy Atkins a été nettement plus fluctuant. Trois pics au-dessus de 6.00 euros/colis ont ponctué la campagne du Brésil et ont révélé des ruptures d’approvisionnement du marché européen plus ou moins prolongées. Le premier pic, sans doute le plus surprenant car improbable, s’est étendu de mi-janvier à mi-février et correspondait au démarrage tardif du Pérou début 2015. Généralement à cette période, le prix des Tommy Atkins est au plus bas face aux grosses quantités expédiées par le Pérou. Ce ne fut pas le cas en 2015 en raison du retard de la production péruvienne. Le second pic est intervenu de mi-avril à mi-mai, période toujours délicate entre la fin de campagne du Pérou et le début de celle d’Afrique de l’Ouest. Le retrait rapide du Pérou et le démarrage tardif de la Côte d’Ivoire ont ouvert une fenêtre commerciale au Brésil.

mangues bateau du bresil - arrivages en europe et en amerique du nord en 2015
mangues bateau du bresil - arrivages en europe et en amerique du nord en 2015
mangues bateau du bresil - prix import des tommy atkins aux pays-bas et des kent en france en 2015
mangues bateau du bresil - prix import des tommy atkins aux pays-bas et des kent en france en 2015
mangues bateau keitt et palmer du bresil - prix import aux pays-bas en 2015
mangues bateau keitt et palmer du bresil - prix import aux pays-bas en 2015

Enfin, le troisième pic de mi-juillet à mi-octobre est plus difficile à expliquer, au moins dans sa première moitié, dans la mesure où les envois du Sénégal, d’Israël et de République dominicaine ont été plus importants que les années précédentes jusqu’à fin août. La consommation serait-elle plus dynamique en cette période estivale ? En septembre et jusqu’à mi-octobre, le marché européen était, de fait, sous-approvisionné en raison du retard de production des Kent du Brésil. La période la plus difficile pour les mangues brésiliennes fut celle de fin mai à fin juin où le cumul des arrivages, notamment d’Afrique, engorgeait le marché européen. Les Tommy Atkins du Brésil se heurtaient à la vive concurrence des Kent largement disponibles à bas prix et leur cours plongeait alors en deçà de 4.00 euros/colis durant plusieurs semaines.

En dépit de difficultés en juin et décembre, la campagne du Brésil a été somme toute positive, si l’on en juge par les prix de vente obtenus par la majorité des quantités exportées vers l’Europe. La progression des tonnages tant en Europe qu’en Amérique du Nord conforte le Brésil dans son rôle de leader dans le domaine de la mangue. La synergie favorisée par la large gamme de fruits et légumes exportés par ce pays contribue fortement à sa position d’origine incontournable dans l’approvisionnement européen.

mangue avion du bresil - arrivage en france en 2015
mangue avion du bresil - arrivage en france en 2015
mangue avion du bresil - prix import kent et autres varietes en france en 2015
mangue avion du bresil - prix import kent et autres varietes en france en 2015

Pérou : une meilleure campagne 2015

D’importantes variations de prix pour les mangues bateau

Après une campagne 2013-14 difficile, où les prix avaient été particulièrement bas durant la première moitié de saison, période de forte exportation, la campagne 2014-15 du Pérou démarrait sous de meilleurs auspices. Non que les volumes aient été moindres. Tout au contraire, puisqu’il exportait vers l’Europe les plus importantes quantités de son histoire, avec 78 300 t contre 72 000 t en 2014. Le calendrier et la répartition des volumes ont favorisé ce déroulement plus adéquat. Le caractère assez tardif de la campagne a permis d’éviter le choc toujours désastreux avec la fin de saison du Brésil, comme ce fut le cas l’année précédente. Les premiers arrivages en seconde quinzaine de décembre 2014 ont été très modérés et ont pris le relais de l’offre brésilienne parvenue en fin de période. La passation entre les deux origines s’est donc effectuée de façon harmonieuse, le Pérou comblant progressivement la diminution des expéditions brésiliennes avant de les remplacer totalement. En janvier-février 2015, le prix des mangues péruviennes atteignait des sommets, alors qu’il était abyssal à la même période l’année précédente (3.00 euros/colis, voire moins). Il se stabilisait entre 7.50 et 8.00 euros/colis, niveau rarement approché à cette époque de l’année, alors que les volumes se développaient progressivement. En seconde quinzaine de février et début mars, la situation était plus tendue avec le pic des livraisons péruviennes, à un rythme de 200 à 250 conteneurs par semaine. Le cours fléchissait mais demeurait satisfaisant (entre 5.50 et 6.00 euros/colis). Dès la deuxième semaine de mars, l’annonce d’une fin de campagne rapide du Pérou et d’un démarrage tardif de l’Afrique de l’Ouest entraînait une reprise des cours. Certes, les livraisons péruviennes diminuaient autour de 150 conteneurs par semaine, mais le marché restait correctement approvisionné par le Brésil qui faisait son retour avec des quantités en progression surtout constituées de Tommy Atkins moins recherchées. Le cours des mangues du Pérou se redressait ainsi jusqu’aux fêtes de Pâques, à des niveaux soutenus de l’ordre de 7.50 euros/colis. Il fléchissait de nouveau par la suite et jusqu’en fin de campagne, début mai, à des niveaux encore fermes (6.50 euros/colis) en dépit d’une qualité moindre.

Fin 2015, la nouvelle campagne d’exportation du Pérou débutait dans de moins bonnes conditions, réitérant à un degré moindre le scénario de 2013-14. En effet, les expéditions s’avéraient plus précoces et se développaient rapidement dès début décembre, alors que les livraisons du Brésil étaient encore importantes. Le cumul de volumes des deux origines entraînait les cours à la baisse, passant de 6.00 euros/colis pour les premières réceptions à 4.50 euros/colis dès mi-décembre, niveau qui allait se maintenir tout au long de janvier 2016.

mangue bateau du perou - arrivage en amerique du nord en 2014-15
mangue bateau du perou - arrivage en amerique du nord en 2014-15
mangue bateau kent du perou - arrivages en europe
mangue bateau kent du perou - arrivages en europe
mangue bateau kent du perou - prix moyen import en france
mangue bateau kent du perou - prix moyen import en france

Une campagne avion plus stable

A l’instar de la campagne bateau, les premières mangues avion du Pérou étaient mises en vente précocement dès mi-novembre 2014. En revanche, les prix demeuraient assez soutenus, entre 4.50 et 5.50 euros/kg, fluctuant au gré de l’importance des volumes réceptionnés. En décembre et janvier, ils se stabilisaient autour de 4.50 euros/kg, compte tenu du chevauchement des campagnes du Pérou et du Brésil qui se traduisait par un excès d’offre au regard de la demande, modérée à cette période. De mi-février à début mars, les cours se raffermissaient et dépassaient les 5.00 euros/kg. En mars, les volumes s’accroissaient alors que la demande restait stable, provoquant des stockages. L’évolution de la maturité des fruits nécessitait des ventes rapides, s’accompagnant inévitablement de concessions tarifaires. Juste avant les fêtes de Pâques, les prix se redressaient sensiblement du fait d’une demande plus prononcée, alors que les volumes s’amenuisaient jusqu’en fin de campagne en seconde quinzaine d’avril.

La campagne 2015-16 a démarré précocement début novembre et s’est rapidement heurtée aux amples livraisons du Brésil, provoquant la chute des cours des deux origines. Contrairement aux envois par bateau, dont les délais de transport génèrent une longue inertie sur les fluctuations de prix, les expéditions par avion sont plus rapidement ajustables. Mi-décembre, la réduction drastique des livraisons du Brésil laissait le champ libre aux produits péruviens, dont les prix se redressaient à la veille des fêtes de fin d’année, période bénéficiant généralement d’une demande plus intense.

L’entame de campagne semble rester le point le plus délicat pour le Pérou, qui est le second fournisseur de mangue de l’Union européenne. Les démarrages précoces lui sont particulièrement défavorables, compte tenu du poids de son rival brésilien au moment de la transition entre les deux origines. En revanche, la fin de saison apparaît plus aisée du fait du démarrage assez tardif de la campagne ouest-africaine depuis plusieurs années. Une diversification variétale pourrait peut-être combler le relatif sous-approvisionnement d’avril.

mangue avion du perou - arrivages en france en 2014-15
mangue avion du perou - arrivages en france en 2014-15
mangue avion kent du perou - prix import en france en 2014-15
mangue avion kent du perou - prix import en france en 2014-15

Afrique de l’Ouest : l’irrésistible ascension

La forte progression des volumes d’Afrique de l’Ouest observée depuis plusieurs années s’est poursuivie en 2015. Entraînés par la Côte d’Ivoire, principale origine exportatrice de la région, le Mali et le Burkina Faso ont également atteint, cette année, leur plus haut niveau d’exportation. Totalisant à elles trois près de 33 000 t en 2015, ces origines avaient exporté 24 200 t en 2013 et 27 400 t en 2014. Certes, la Côte d’Ivoire reste le moteur de cette progression avec 23 000 t, mais les pays voisins ont aussi participé à cet élan avec une augmentation de 1 000 t pour le Burkina Faso et de 2 000 t pour le Mali. En dépit de leur localisation enclavée, ces deux pays confortent leur place de fournisseurs réguliers du marché européen.

Côte d’Ivoire : campagne sous haute surveillance

A l’automne 2014, face à la forte augmentation des interceptions pour cause de mouche du fruit, les services phytosanitaires de la Commission européenne demandaient à la Côte d’Ivoire d’établir promptement un programme de lutte efficace. En dépit du faible délai avant le démarrage de la campagne suivante, l’administration ivoirienne ainsi que les opérateurs de la filière se mobilisaient afin d’apporter une réponse. Compte tenu de la gravité de la situation qui pouvait entraîner, à terme, un embargo de l’origine, les intervenants de la filière ivoirienne parvenaient à proposer et à mettre en œuvre un plan de lutte :

  • L’administration ivoirienne, appuyée par le PIP, élaborait un programme de lutte contre la prolifération parasitaire, assorti de formations sur le terrain. Il était complété par des distributions aux producteurs de produits de traitement et de moyens d’épandage. Les services phytosanitaires étaient renforcés pour limiter les envois de fruits infestés. Les exportations de fruits par les voyageurs étaient aussi prohibées.
  • Les professionnels de la filière participaient également à cet effort commun en améliorant leur organisation dans les stations de conditionnement. Là encore, des formations sur la détection des piqûres de mouche étaient dispensées.

Il était d’autant plus urgent de prendre ces mesures, qu’au niveau européen, les modalités de contrôle étaient intensifiées, notamment aux Pays-Bas et en Belgique où des audits communautaires des services phytosanitaires avaient laissé entrevoir quelques défaillances.

Ce coup de semonce aura, semble-t-il, été bénéfique à la filière ivoirienne, au vu de la réduction drastique du nombre d’interceptions durant la campagne 2015. En effet, seulement dix ont été comptabilisées par les services de la Commission européenne, contre 64 en 2014. Même si le nombre d’interceptions a été supérieur à celui toléré par les services de la Commission européenne (5), les progrès sont frappants. Ce résultat probant ainsi que la poursuite et l’intensification de la lutte engagée devraient éloigner le risque de sanctions plus lourdes à l’égard du plus important fournisseur ouest-africain de l’UE.

mangue bateau de cote ivoire - arrivages en france en 2015
mangue bateau de cote ivoire - arrivages en france en 2015
mangue bateau kent de cote ivoire - prix import en france
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Une campagne bateau dense et concentrée

Contrairement aux années précédentes où les exportations débutaient sur concertation des professionnels lorsque les fruits étaient jugés physiologiquement mûrs, les pouvoirs publics ivoiriens ont décidé, cette année, de promulguer une date de début de récolte dans le but d’éviter l’envoi de fruits immatures et, par là même, de ternir l’image de l’origine dès le début de campagne. Elle a ainsi été fixée au 20 mars, décision arbitraire, semble-t-il, dans la mesure où la majorité des fruits n’avaient apparemment pas atteint un point de coupe optimal. En fait, cette date a sans doute été choisie pour permettre l’exportation de mangues Amélie, théoriquement plus précoces, au moment où le marché européen était relativement sous-approvisionné du fait de la diminution rapide des livraisons du Pérou arrivé en fin de saison. En réalité, la maturation des Amélie n’était pas nettement plus avancée que celle des Kent. Aussi, à part quelques conteneurs d’Amélie de qualité moyenne réceptionnés courant avril, le réel démarrage de la campagne s’est effectué en première décade d’avril, assurant un début de commercialisation en fin de mois. Bénéficiant d’un marché peu approvisionné après la disparition des mangues péruviennes, les fruits de Côte d’Ivoire se sont écoulés de façon fluide tout au  long du mois de mai, à des prix soutenus mais en déclin progressif, de 7.00 euros/colis de moyenne en début de période à 5.00 euros/colis fin mai. Sous l’effet d’un approvisionnement massif en peu de temps, les fruits réceptionnés étaient stockés de façon  plus ou moins prolongée, entraînant une dégradation qualitative. La concentration de la campagne ivoirienne n’est pas un fait nouveau. Ainsi, 73 % des volumes totaux ont été livrés durant le seul mois de mai en 2015. En dépit d’une assez bonne répartition sur les différents marchés européens, les mangues de côte d’Ivoire ont vu leur cours fléchir mi-juin, pour se stabiliser autour de 3.00 euros/colis. Les derniers lots s’écoulaient en première quinzaine de juillet à prix inférieurs. A part les quelques envois d’Amélie en début de campagne et de Keitt en juin, la Côte d’Ivoire n’a exporté que des Kent.

Contrairement à l’année précédente, les fruits ivoiriens se sont mieux vendus en première partie de campagne et ont vu leur prix se détériorer fortement en seconde moitié. Le marché a peut-être atteint là les limites de sa capacité d’absorption, sachant que la consommation de fruits tropicaux se réduit à cette période du fait de la présence massive de fruits de saison, souvent moins chers et plus habituels pour le public. Concentration de l’offre et fluidité du marché sont généralement antinomiques. La Côte d’Ivoire se trouve toujours tributaire des démarrages assez tardifs et des risques réels de dégradation qualitative des fruits des arrivages de juin. Cette origine reste donc coincée entre la maturité physiologique des fruits et l’arrivée des pluies en seconde quinzaine de mai, souvent synonyme de développements fongiques. Si la filière est parvenue à endiguer le problème de l’infestation de la mouche du fruit, qui illustre bien l’importance qui lui est accordée, pourquoi ne parviendrait-elle pas à améliorer la qualité des mangues de fin de campagne ?

Mangue avion : une campagne contrastée

La campagne d’exportation par avion a suivi à peu près le même profil que la campagne bateau, mais avec un léger décalage dans le temps. Elle s’est étendue de mi-avril à mi-juin, comme l’année précédente. Les premiers arrivages ont été réceptionnés en semaine 16, après les fêtes de Pâques. Compte tenu d’une soudure difficile entre le Pérou et l’Afrique de l’Ouest, ces produits se sont bien valorisés au cours des cinq premières semaines de campagne, les cours fléchissant de 5.50 à 4.00 euros/kg en seconde quinzaine de mai. La deuxième partie de campagne s’est caractérisée par des prix à la baisse, jusqu’à 2.50 euros/kg en fin de campagne. A l’instar des années précédentes, les opérateurs ivoiriens ont compensé le démarrage tardif des envois par bateau par des envois importants par avion. Les volumes se sont développés très rapidement, comblant tout d’abord le déficit de fruits sur le marché avec des prix élevés. Le rythme des livraisons s’est maintenu à un niveau élevé, dépassant rapidement les capacités d’absorption du marché. L’accumulation de volumes qui s’écoulaient plus difficilement, notamment en raison de l’arrivée des fruits de saison (précoces cette année suite à un hiver peu marqué), a enclenché le cycle mévente/stockage/dégradation qualitative (maturité avancée)/baisse des cours. La concurrence des autres origines ouest-africaines, qui expédiaient les mêmes produits à la même période, ne faisait qu’accentuer ce cycle, qui s’est terminé par des ventes de dégagement et une désaffection de l’origine par la clientèle qui reportait ses achats vers les fruits de saison ou les mangues d’autres origines. On peut estimer que, sur un millier de tonnes expédiées, un tiers a été vendu à des prix inférieurs à 4.00 euros/kg, seuil en deçà duquel les résultats économiques sont affectés.

mangue avion kent de cote ivoire - arrivages en france
mangue avion kent de cote ivoire - arrivages en france
mangue avion kent de cote ivoire - prix import en france
mangue avion kent de cote ivoire - prix import en france

Mali : nouveau score

Avec près de 6 000 t exportées en 2015, le Mali a atteint son meilleur score sur le marché européen. Sur ce total, on estime à environ 800 t la part des fruits expédiés par avion et à plus de 5 000 t les envois par bateau via Abidjan ou Dakar.

Mangue avion : une campagne linéaire

Plus précoce, la campagne du Mali a débuté en seconde quinzaine de mars, avec toutefois une semaine de retard par rapport à 2014. Les premiers envois étaient composés d’Amélie et de Valencia. Comme les volumes du Pérou étaient modérés à cette période, ces mangues se sont vendues entre 3.50 et 4.00 euros/kg à la veille des fêtes de Pâques. Les Amélie, alimentant des circuits de distribution plutôt ethniques, se sont régulièrement vendues autour de 3.00 euros/kg jusqu’au début juin. Les Valencia se négociaient à un prix plus élevé en début de campagne (entre 3.50 et 4.00 euros/kg), alors que le marché recevait peu de Kent. Par la suite, leur cours fléchissait avec l’apparition des Kent, dont la forte présence au cœur du mois de mai faisait plonger le cours des Valencia en deçà de 3.00 euros/kg. Les derniers lots expédiés fin mai retrouvaient des prix légèrement plus fermes. La campagne malienne de Kent démarrait en même temps que celle de Côte d’Ivoire, en semaine 16. Cette variété prenait rapidement les devants sur le marché européen. Les premières expéditions se vendaient entre 4.00 et 4.50 euros/kg, mais ces prix se dégradaient rapidement sous l’effet de la présence massive des fruits ivoiriens. Ils se stabilisaient entre 3.00 et 3.50 euros/kg jusqu’en fin de campagne, début juillet. L’arrêt des envois de Côte d’Ivoire ne provoquait pas de raffermissement des cours, comme ce fut parfois le cas, en raison de la moindre qualité des fruits et de la concurrence plus marquée et plus précoce du Sénégal et du Mexique.

mangue avion du mali - arrivages en france
mangue avion du mali - arrivages en france
mangue avion du mali - prix import en france en 2015
mangue avion du mali - prix import en france en 2015

Une campagne maritime plus ample

Comme déjà souligné plus haut, les volumes maliens expédiés par bateau se sont nettement accrus cette année, avec environ 2 000 t de plus que l’année précédente. La campagne du Mali s’est étendue de la deuxième semaine de mai à mi-juillet et a connu des cours suivant peu ou prou la même évolution sur les différents marchés européens où elle était répartie d’égale façon. S’établissant autour de 6.00 euros/colis pour les premiers envois, ils s’érodaient rapidement à 4.50-5.00 euros/colis fin mai et en juin sous l’effet des volumes globaux du Mali, mais également du Burkina Faso et surtout de Côte d’Ivoire. Ce n’est qu’en première quinzaine de juillet que les prix se raffermissaient et revenaient presque à leur point de départ, avec la fin de la campagne de Côte d’Ivoire et les livraisons encore peu marquées du Sénégal. Le caractère un peu plus tardif de la production du Mali permettait de trouver une fenêtre commerciale plus favorable. Globalement, la comparaison des courbes de prix de 2014 et de 2015 fait apparaître des cours en perte de vitesse d’une année sur l’autre, vraisemblablement due à l’augmentation des volumes commercialisés. Le Mali reste une origine complémentaire de la Côte d’Ivoire de par son enclavement qui rend plus complexe la logistique d’évacuation des produits et majore les coûts d’acheminement. Néanmoins, en jouant sur le caractère plus ou moins précoce de sa production et en diversifiant les marchés destinataires, le Mali trouve des créneaux de commercialisation valorisant ses produits.

mangue bateau du mali - prix import en europe en 2015
mangue bateau du mali - prix import en europe en 2015

Burkina Faso : un meilleur ancrage européen

Une campagne avion allongée

Le Burkina Faso a amplifié sa présence sur les marchés européens au cours de la campagne 2015, avec plus de 4 000 t expédiées contre 3 000 t en 2014, mais avec une répartition similaire : 22 % par avion et 78 % par bateau. Profitant des bonnes conditions de marché en Europe, les exportateurs burkinabés ont joué sur la légère précocité de leur récolte pour livrer leurs premiers volumes dès la semaine 10 (début mars), soit trois semaines avant le Mali et six avant la Côte d’Ivoire. Certes, les quantités étaient limitées et essentiellement composées d’Amélie. Mais, sur un marché demandeur, elles se sont vendus à plus de 3.50 euros/kg durant le premier mois de commercialisation, baissant par la suite autour de 3.00 euros/kg du fait du développement de l’offre ouest-africaine et de la concurrence de variétés plus recherchées. En semaine 16 débutait la commercialisation des Kent, avec des prix élevés en seconde quinzaine d’avril avant l’arrivée massive des fruits ivoiriens. Partant de 4.50 euros/kg, le prix ne cessait de fléchir jusqu’en fin de campagne, autour de 3.00 euros/kg. On notera l’allongement de la campagne jusqu’en semaine 29 en 2015, alors que traditionnellement elle s’achevait trois semaines plus tôt. Si certaines entreprises expédient encore des fruits de qualité standard, d’autres parviennent à valoriser leurs produits par une sélection rigoureuse et une présentation qui n’a rien à envier aux marques les plus renommées des origines voisines. Les exportateurs burkinabés ont complété leur gamme avec quelques envois de Valencia de mi-avril à mi-mai. Réceptionnées en même temps que les Kent, elles se sont généralement assez mal vendues, les prix chutant de 4.00 euros/kg à 2.50 euros/kg.

mangue avion du burkina faso - arrivages en france
mangue avion du burkina faso - arrivages en france

Une campagne bateau rapide

Concentrées de mi-mai à mi-juin, les expéditions par bateau du Burkina Faso ont subi la forte concurrence des autres origines ouest-africaines. De 5.00 à 6.00 euros/colis en seconde quinzaine de mai, les prix chutaient entre 4.00 et 4.50 euros/colis en première quinzaine de juin, subissant le poids des tonnages ivoiriens et maliens encore disponibles. Le handicap logistique pour l’exportation intercontinentale contribue à freiner les envois vers l’Europe, en dépit du développement des volumes en 2015. Aussi les opérateurs du Burkina Faso se tournent-ils vers d’autres opportunités commerciales qui paraissent également intéressantes, comme le label bio, mais surtout la mangue séchée et le commerce régional qui a décuplé ces dernières années.

mangue avion du burkina faso - prix import en france en 2015
mangue avion du burkina faso - prix import en france en 2015

République dominicaine : toujours plus haut

La République dominicaine a battu un nouveau record en 2015 avec une augmentation de ses exportations de 2 000 t par rapport à 2014, totalisant 13 000 t exportées vers l’Europe. La fermeture, au printemps, des frontières des États-Unis pour les mangues dominicaines en raison des risques d’infestation par la mouche méditerranéenne (fermeture levée depuis) pouvait laisser croire à un basculement massif des tonnages vers le marché européen. Mais cet événement n’a pas ou peu influencé la répartition des volumes, les États-Unis n’important traditionnellement que des quantités marginales. Le développement des volumes dirigés vers l’Europe découle bien d’une volonté de progression sur ce marché. Présentes de fin mai à fin août, les mangues dominicaines renforcent l’offre disponible durant la période estivale. Comme pour Porto Rico, il s’agit essentiellement de Keitt. Elles sont dirigées principalement vers les circuits de distribution intégrés, auxquels elles offrent une alternative aux mangues de fin de campagne d’Afrique de l’Ouest, du Brésil et d’Israël. Peu à peu, et en dépit de problèmes phytosanitaires et logistiques, les mangues dominicaines confortent leur part de marché sur les marchés européens. Autour de 5.50 euros/colis de fin mai à mi-juillet durant la période de confrontation avec les mangues africaines, elles se sont vendues à prix raffermis de mi-juillet à mi-août, entre 6.00 et 6.50 euros/colis. En fin de campagne en seconde quinzaine d’août, leur cours progressait dans un contexte d’approvisionnement en diminution, avec la fin de saison du Sénégal et le fléchissement des livraisons israéliennes. Moins versatile que l’année précédente, le cours des mangues dominicaines s’est situé à un niveau supérieur tout au long de la campagne, entre 5.50 et 7.00 euros/colis.  

mangue bateau de rep dom - prix import en france
mangue bateau de rep dom - prix import en france

Sénégal : Toujours en progression

En 2014, le Sénégal avait dépassé le seuil des 10 000 t exportées vers l’Europe (10 300 t), record historique pour l’origine. Cette progression, au regard des 6 000 à 8 000 t traditionnellement expédiées, pouvait être considérée soit comme une exception due à une année particulièrement favorable, soit comme le signe d’un développement plus durable. Ce qui semble bien être le cas. En effet, les 11 500 t exportées en 2015 confirment l’évolution de la filière sénégalaise. Certes, la progression est moins importante qu’entre 2013 et 2014, mais le mouvement est là. Les quantités expédiées ont progressé de façon ininterrompue depuis six ans et ont même doublé. Le Sénégal se hisse donc dans le club des dix origines fournissant des mangues aux marchés européens.

En 2015, la campagne du Sénégal a été un peu plus précoce, commençant en deuxième semaine de juin, soit une semaine plus tôt qu’en 2014. Ce sont les envois par avion qui ont initié la campagne, avec des volumes en rapide progression. Leur cours s’est maintenu autour de 3.50-4.00 euros/kg durant toute la campagne, qui s’est prolongée jusqu’à début août. Les risques de développement fongique en fin de campagne ont incité les opérateurs à suspendre leurs expéditions.

En 2014, les envois par avion et bateau du Sénégal avaient été simultanés, montrant une précocité marquée. En 2015, les premiers conteneurs n’ont été mis en marché que deux semaines après les livraisons aériennes. Ainsi, les mangues bateau ont été proposées fin juin. Cette arrivée un peu plus tardive a été plutôt bénéfique, car des stocks de Côte d’Ivoire étaient encore disponibles courant juin et leur qualité dégradée générait une tendance à la baisse des prix. Les fruits du Sénégal arrivaient alors que le marché s’allégeait, autorisant des mises à prix autour de 6.00 euros/colis. La modération des apports de Kent à cette période permettait rapidement le raffermissement du cours des mangues du Sénégal, qui frisait les 7.00 euros/colis pendant tout juillet. En août, il fléchissait autour de 5.50 euros/colis de moyenne, prix nettement supérieur à celui de la campagne précédente à la même période où il plongeait à 4.00 euros/colis, puis 3.00 euros/colis. Le mois d’août est une période sensible pour les produits du Sénégal avec l’arrivée de précipitations, synonymes d’attaques fongiques. Cela s’est traduit par un élargissement des fourchettes de prix, avec des prix hauts pour les fruits de qualité supérieure et des prix bas pour ceux dont la qualité se détériorait. Au tournant d’août-septembre, l’absence de Kent entraînait un raffermissement des prix autour de 6.00 euros/colis pour les derniers lots disponibles.

La campagne du Sénégal s’est caractérisée non seulement par un accroissement des volumes exportés, mais également par des résultats économiques plus élevés que l’année précédente. Sa période de commercialisation reste difficile, coincée en amont par les importants volumes des origines ouest-africaines en fin de saison et la concurrence plus ou moins marquée d’Israël. Ainsi, la mise en place de la campagne sénégalaise est souvent incertaine. La supposée baisse de consommation des mangues durant l’été et le risque de dégradation qualitative en dernière partie de campagne constituent aussi des obstacles. Il semble que l’amélioration qualitative perçue sur les marchés destinataires découle d’une meilleure approche des opérateurs du Sénégal en termes de sélection des fruits, de méthode de récolte et de conditionnement.

mangue avion du senegal - prix import en france
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mangue bateau du senegal - prix import en france
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Mexique : léger retour

La baisse continue des volumes expédiés par le Mexique vers l’Europe durant les quatre dernières années s’apparentait à un retrait progressif de l’origine. L’année 2015 a enrayé le processus avec un peu plus de 3 000 t expédiées, contre à peine 2 200 t en 2014. Ce regain, aussi modeste soit-il, montre que le Mexique reste présent dans l’approvisionnement européen. Certes, les exportateurs mexicains sont essentiellement tournés vers les marchés nord-américains et plus particulièrement les États-Unis, qui captent la grande majorité de leurs volumes. Vu d’Europe, le Mexique reste un fournisseur de Kent en période estivale (juin à août). Mais cette image ne reflète que la partie émergée, car le pays dispose d’une campagne très large compte tenu de sa taille et de la multiplicité des zones adaptées à la culture du manguier. Elle s’étend de janvier à octobre au gré des régions productrices et des variétés cultivées. Les états du sud (Chiapas, Oaxaca, Veracruz), du centre-ouest (Guerrero, Michoacán) et du nord-ouest (Nayarit, Sinaloa) représentent 85 % de la production mexicaine. Celle-ci est en partie consommée localement et pour une large part exportée vers les États-Unis voisins, de 350 000 à 400 000 t selon les années. Les accords commerciaux entre les deux pays favorisent évidemment les flux de produits mexicains, qui trouvent là des débouchés conséquents appuyés par une logistique rodée. De plus, la filière mangue mexicaine bénéficie, aux États-Unis, d’une clientèle captive du fait de l’importance des migrations de populations latino-américaines, mais également d’une forte communication en faveur du produit, à l’instar de l’avocat.

mangue avion kent du mexique - prix import en france
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Dans ces conditions, le marché européen demeure une préoccupation secondaire pour les professionnels mexicains. Les exportations se limitent à une période allant de juin à août et sont centrées sur la Kent. En 2015, la campagne a été particulièrement précoce, avec la réception des premiers lots par avion dès la fin mai. Elle s’interrompait également plus rapidement fin juillet, alors qu’auparavant elle se prolongeait jusqu’en seconde quinzaine d’août. Les ventes ont été régulières et les prix stables, entre 4.00 et 4.50 euros/kg de moyenne. La qualité a été jugée inégale, de nombreux lots manquant de coloration et présentant des développements fongiques, surtout en fin de campagne. Le Mexique demeure toutefois une origine à surveiller compte tenu de son énorme potentiel d’exportation et de sa gamme variétale. Ce géant, timide en Europe, reste attentif à toutes les opportunités de marché qui pourraient s’offrir à lui.

Israël : léger retrait

Le record de volumes expédiés par Israël en 2014 (près de 16 000 t) ne s’est pas réitéré en 2015. Les conditions météorologiques moins favorables ont comprimé ses envois vers le marché européen. Néanmoins, Israël demeure un fournisseur incontournable durant la période estivale. Avec environ 13 800 t exportées en 2015, l’origine conforte sa position dans le peloton de tête des sources d’approvisionnement des pays européens.

Brève campagne avion

Les premiers lots d’Israël expédiés par avion ont été commercialisés fin juillet, marquant un retard de trois semaines par rapport à l’année précédente. Plus concentrée, la campagne s’achevait deux semaines plus tôt. Les premières variétés expédiées étaient Maya et Aya, dont les cours, orientés à la hausse après les premières ventes, revenaient rapidement à leur niveau initial après trois semaines de campagne. De petits calibres, ces variétés sont diversement appréciées sur le marché européen. Les exportations israéliennes se concentraient ensuite de mi-août à mi-septembre avec des Kent, dont les prix augmentaient de 3.80 à 4.20 euros/kg en l’absence de concurrence, le Sénégal et le Mexique ayant terminé leur campagne. Les autres variétés proposées par Israël (Omer, Shelly) comblaient le déficit relatif en mangue avion et bénéficiaient de prix également orientés à la hausse.

mangue avion israel - prix import en france en 2015
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Bonne campagne maritime

Les premiers envois par bateau, en volumes modérés, ont été effectués à partir de juillet, mais leur commercialisation ne s’est faite que plus tard. Ils étaient majoritairement composés de Haden, Omer et Shelly, régulièrement vendues entre 6.50 et 7.50 euros/colis sur un marché modérément approvisionné. Fin août, ces variétés laissaient la place aux Kent et Keitt, de bonne tenue en dépit d’une coloration médiocre. Compte tenu du retard de la campagne brésilienne et du déficit annoncé de la production espagnole, les mangues d’Israël rencontraient peu de concurrence. Aussi se sont-elles vendues à prix soutenus (autour de 8.00 euros/colis) jusqu’en fin de campagne, avec peu de fluctuations.

La position d’Israël en tant que fournisseur de mangue en période estivale paraît difficile, a priori, si l’on estime que la consommation de ce fruit ralentit à cette période de l’année, avec les congés d’été et la profusion de fruits de saison. Or si l’on observe, d’une part, les quantités globales mises en marché en juillet et août et, d’autre part, les niveaux de prix pratiqués sur les différents marchés européens, force est de constater que ce raisonnement fortement ancré dans les mentalités vacille. L’apparente fragilité de la fenêtre de commercialisation d’été est contredite par le maintien, voire la progression des origines présentes à cette époque, notamment Israël.

mangue bateau israel - arrivages en europe
mangue bateau israel - arrivages en europe
mangue bateau israel - prix import en europe en 2015
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mangue israel - repartition volumes importes en europe en 2015
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Porto Rico : une campagne équilibrée

Cette origine, qui s’affirmait sur le marché européen depuis deux ans et qui avait dépassé les 10 000 t exportées, revient en 2015 au niveau de 2012, avec un total de 7 400 t. D’une durée équivalente à celle de 2013, la campagne 2015 a été plus précoce, à l’instar de la précédente. Elle a, en effet, débuté mi-avril, soit un mois avant celle de 2014. Plus longue et moins importante en tonnages, elle a bénéficié de cours plus réguliers et plus fermes. En avril, les Keitt de Porto Rico profitaient du relatif sous-approvisionnement de la période de soudure entre le Pérou et l’Afrique de l’Ouest. Les cours moyens se situaient alors autour de 7.00 euros/colis et fléchissaient ensuite progressivement, parallèlement au développement de l’offre ouest-africaine, atteignant leur plus bas niveaux de juin à mi-juillet (5.50 euros/colis). A partir de là, les prix retrouvaient, pour une quinzaine de jours, leur niveau de début de campagne du fait d’une offre modérée en produits de qualité recherchés par la grande distribution. Avec l’entrée en campagne d’Israël fin juillet, les prix s’érodaient ponctuellement, avant de se raffermir en seconde quinzaine d’août, qui marquait la fin de campagne de l’origine.

Bien que moins importante en quantité, la campagne de Porto Rico a permis de satisfaire les distributeurs avec des produits de qualité standard mais assez régulière et, surtout, a su profiter des variations d’approvisionnement des origines concurrentes.

mangue bateau de porto rico - prix import en france
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Espagne : bingo !

De bonnes circonstances

Décidément, le seul pays producteur européen de mangue n’a pas fini de nous surprendre. Avec une progression fulgurante ces dernières années, l’Espagne s’est hissée dans le top 10 des fournisseurs du marché européen. Chaque année, le profil et le déroulement de la campagne espagnole diffèrent, mais force est de constater qu’elle reste génératrice de revenus pour les opérateurs de la filière. Un heureux concours de circonstances a permis la réalisation d’une bonne campagne en 2015. Elle fut d’ailleurs assez identique à la précédente, si ce n’est une modification sensible des volumes mis en marché.

Comme en 2014, les conditions météorologiques du printemps, particulièrement douces, favorisaient une floraison laissant présager d’une forte production. Mais cette bonne floraison apportait finalement une fructification moindre au tournant de l’été. Les très fortes chaleurs de juillet et août se chargeaient ensuite de transformer une production prometteuse en volume en une récolte finalement déficitaire. Quelques semaines avant le début des premières récoltes, les professionnels espagnols mentionnaient un déficit de 50 à 70 % par rapport à l’année précédente, ce qui modifiait radicalement les stratégies commerciales des metteurs en marché. Si la vague de chaleur de l’été a compromis l’importance de la production, elle a par ailleurs contribué à la bonne qualité des fruits. En revanche, la récolte a été majoritairement composée de gros calibres, qui ne sont pas toujours les plus demandés, notamment par le secteur de la distribution qui vend à la pièce. Mais en l’absence d’alternative, il a bien fallu recourir à l’offre espagnole.

En 2014, les prévisions initiales de récolte avoisinaient les 24 000 t, pour une réalisation d’environ 18 000 t, score inégalé pour cette origine, la propulsant à la quatrième place des fournisseurs du marché européen. En 2015, les prévisions, à hauteur des réalisations de 2014 (18 000 à 20 000 t) se traduisaient finalement par des expéditions de l’ordre de 9 000 à 10 000 t. Ce net recul ne remettait pourtant pas en cause ni la place prépondérante de l’Espagne dans le commerce de la mangue, ni surtout le bilan économique très positif de la campagne.

Une baisse drastique et rapide des exportations d’Israël dès début septembre et un important retard du démarrage de la campagne d’hiver du Brésil fin octobre ont laissé le marché européen sans réelle concurrence durant la période de production espagnole. Sans autres origines majeures, les opérateurs espagnols avaient toute latitude pour valoriser leur production déficitaire.

Un parcours sans fautes

Les mangues Osteen, variété fer de lance de la production espagnole (environ 80 %) ont initié la campagne dès mi-août, les conditions météorologiques accélérant leur maturation. Mais ce n’est qu’à partir de mi-septembre que l’offre se développait fortement. Les expéditions se poursuivaient jusqu’à fin octobre. Particulièrement élevé jusqu’à fin septembre, leur cours s’érodait progressivement jusqu’en fin de campagne, tout en restant à des niveaux inégalés jusque-là. La comparaison des courbes de prix moyens des deux dernières campagnes (cf. graphique) ne nécessite guère de commentaires. Parallèlement, l’Espagne proposait des Kent en quantités limitées de mi-septembre à mi-octobre, régulièrement vendues entre 4.00 et 4.50 euros/kg, alors que le Brésil débutait sa campagne avion. Les deux origines obtenaient des prix élevés et stables, compte tenu d’une offre globale modérée, sans réelle interférence entre elles comme ce fut parfois le cas. Déjà présentes les années antérieures, les Irwin d’Espagne ont confirmé leur ancrage, notamment sur les marchés de gros où elles obtenaient régulièrement des prix fermes. Disponibles de septembre à mi-octobre, elles élargissaient l’offre espagnole sur un créneau haut de gamme de qualité avion, prêtes à consommer. De taille plus modeste que les autres variétés espagnoles, elles constituaient également une diversification de la gamme à cette période de sous-approvisionnement. Enfin, la campagne espagnole s’achevait avec les Keitt en première quinzaine de novembre. Plus développée les années précédentes, la campagne des Keitt a été écourtée cette année, avec des volumes limités vendus également à prix soutenus. Quelques lots de Tommy Atkins ont complété l’éventail variétal espagnol en début de campagne. Mais elles ont été davantage dirigées vers le marché national et le Portugal où cette variété est mieux acceptée que sur les autres marchés européens.

Outre les circonstances favorables dont a bénéficié l’Espagne, il convient d’ajouter un facteur qui a sans doute amplifié la réussite de cette campagne. Le déficit de production a considérablement réduit le rôle des circuits de commercialisation alternatifs, généralement pourvoyeurs de marchandises de moindre qualité vendues localement aux enchères. Ainsi, la plus grande partie des fruits a été commercialisée par des structures solides et professionnelles, avec ce que cela comporte en termes d’implication dans la culture et le traitement des fruits.

Progression et diversification de la production

La production espagnole poursuit sa croissance, si l’on en juge par l’intensification des plantations dans la région de Malaga où les moindres parcelles de terre disponibles sont aménagées en terrasses et plantées de manguiers. Dans certaines zones, cette propagation se fait au détriment des vergers d’avocatiers, autre culture phare de la région. Les plantations s’installent de plus en plus en altitude, sur les pentes des vallées, reléguant les avocatiers vers les fonds de vallées plus humides.

L’Osteen, bien adaptée au terroir et de bonne productivité, reste la première variété commercialisée mais aussi plantée. Elle assure l’essentiel de la campagne en volume et conforte sa position dans le commerce européen. Mais la diversification variétale demeure un thème d’actualité pour les arboriculteurs du sud de l’Espagne. Les bons résultats de la campagne d’Irwin incitent certains opérateurs à intensifier les plantations. Certes moins productive que l’Osteen, cette variété assez précoce a permis l’ouverture de nouveaux créneaux commerciaux. Sa production devrait néanmoins rester limitée, si l’objectif est de conserver un caractère haut de gamme au produit. L’extension du verger espagnol viendrait plutôt de la Keitt qui, plus tardive et productive, permet surtout un prolongement de campagne sur novembre. Certaines plantations sont en cours, mais le risque d’une confrontation avec l’offre massive du Brésil à cette période rend sa commercialisation plus hasardeuse.

La réussite de cette campagne incitera vraisemblablement les opérateurs espagnols à poursuivre dans la voie de l’expansion des vergers. Le risque sous-tendu de cette évolution est de connaître des campagnes moins aisées, avec une production pléthorique face à une concurrence forte (Israël et Brésil). Sachant que l’implantation du verger espagnol se fait en périphérie de la zone optimale pour la plante, la production reste fragile et sujette à d’importantes variations.

mangue espagne - prix import par variete en france en 2015
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mangue osteen espagne - prix import en france
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