L’effet taux de change

  • Publié le 13/05/2016 - Elaboré par LOEILLET Denis
  • FruiTrop n°240 , Page 94 à 95
  • Gratuit

Comme sur tout marché concurrentiel où l’innovation est faible (segmentation très réduite), la part de marché d’une origine découle beaucoup de son niveau de compétitivité sur le prix. Ainsi, s’intéresser au coût de production paraît logique.

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Mais il est difficile d’avoir accès à cette information et la diversité des situations dans la plupart des origines fait qu’une moyenne par pays est trop frustre. De plus, les entreprises intègrent plus ou moins de fonctions (logistique par exemple) ou bien développent une approche de transnationale (recours à l’optimisation fiscale). Dans ce cas, les comptes traduisent d’abord et avant tout une logique financière et en aucun cas économique. Aussi, nous aborderons la question d’une autre manière en regardant si la variation du taux de change entre 2014 et 2016 a eu un impact dépressif ou bien euphorisant sur la compétitivité globale d’une origine donnée. La figure proposée rend compte de ce traitement appliqué à quasiment toutes les origines qui exportent sur le marché européen.

Pas besoin d’un long discours pour repérer les gagnants et les perdants à la loterie des taux de change. On peut d’ailleurs aisément les regrouper en trois ensembles. Le premier est quasiment mono-origine, c’est le groupe des gagnants avec la Colombie qui fait un carton puisque entre 2014 et 2016 (taux de change moyen annuel) sa compétitivité a augmenté mécaniquement de 14 % ! Le Ghana peut aussi être raccroché à cet ensemble, mais avec des gains beaucoup plus modestes : de l’ordre de 4 % et en très forte érosion par rapport aux années précédentes. Le second ensemble est constitué des pays de la zone franc CFA (Cameroun et Côte d’Ivoire), qui bénéficient d’un taux de change fixe avec l’euro, mais aussi du Mexique dont la monnaie varie très peu face à l’euro. Enfin, le dernier groupe est celui des perdants avec un tir groupé de l’Équateur, du Costa Rica, de la République dominicaine, du Panama, etc. L’effet dépressif lié au taux de change varie entre - 13 et - 18 %. Le Pérou perd aussi en compétitivité mais limite les dégâts avec - 6 %.

En résumé, la variation de l’écart de compétitivité n’est rien moins que de 32 % entre la Colombie (+ 14 %) et le Guatemala (- 18 %) ! Toute la question est de savoir si ce fossé a fait bouger les lignes aussi bien en termes de parts de marché relatives que sur un possible arbitrage entre États-Unis et UE par exemple. Difficile de conclure de manière définitive sur une seule année, mais on peut dire qu’il y a une relation entre effet dépressif du taux de change et exportations vers l’UE ou vers les États-Unis. La Colombie est en très forte progression sur l’UE en termes de volume (+ 21 %) et améliore de 14 % sa compétitivité. A l’inverse, l’Équateur réduit sa présence sur l’UE de 8 %, handicapée qu’elle serait par un taux de change défavorable (- 16 %). Dans le même temps, l’arbitrage équatorien est clairement en faveur du marché UE. Le Costa Rica limite la casse avec une présence en volume quasi stable (+ 1 %) et un impact négatif majeur lié au taux de change de 17 %. Dans un contexte de baisse générale de ses exportations, l’UE est restée son marché préféré.

Attention de ne pas tenter de tout expliquer par une variation du taux de change, car certains pays ne peuvent pas arbitrer entre plusieurs marchés et la production subit bien d’autres aléas que la variation du seul taux de change (maladies, événements climatiques, problèmes sociaux, etc.). Il faudrait aussi isoler l’effet des augmentations de surface ou de l’amélioration de la productivité, et puis une structure de coût englobe des achats dans différentes monnaie, etc. En outre, pour les origines fortement démarquées (commerce équitable et bio), comme la République dominicaine ou encore le Pérou, la concurrence est moins globale et frontale avec les autres origines. Il n’en reste pas moins qu’il est intéressant de constater comment un facteur extérieur au secteur et peu maîtrisable agit sur les retours économiques dans les pays producteurs.

banane - marche europeen - impact variation taux de change
banane - marche europeen - impact variation taux de change

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