Mangue : Marché européen

  • Publié le 17/04/2018 - Elaboré par GERBAUD Pierre
  • FruiTrop n°255 , Page 44 à 47
  • Gratuit

Toujours plus de volumes

Le marché international de la mangue poursuit sa progression, si l’on en juge par les dernières statistiques disponibles sur les échanges en 2017. Chaque année ou presque inscrit un nouveau record quantitatif. Ainsi le seuil des 300 000 tonnes importées en Europe, dépassé en 2016, ne constituait pas un essor ponctuel mais le signe d’une évolution durable. L’année 2017 confirme la tendance générale avec plus de 3 000 tonnes supplémentaires.

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Un marché toujours en progression

Les 338 600 tonnes importées par l’Union européenne en 2017 marquent une nouvelle progression au regard des 335 000 tonnes de 2016. Même si le rythme d’augmentation des volumes des pays tiers ralentit par rapport aux années antérieures, le marché de la mangue se consolide année après année. Sur le moyen terme, l’évolution est remarquable. Les 350 000 tonnes sont d’ailleurs dépassées si l’on inclut les livraisons de l’Espagne, estimées autour de 22 000 tonnes. Cette évolution positive se retrouve également pour le premier pôle de consommation de mangue que sont les États-Unis, dont les importations explosent de nouveau en passant de 464 800 tonnes en 2016 à 504 900 tonnes en 2017. L’écart se creuse davantage entre les États-Unis et l’Europe aux dépens de cette dernière, dont la population est pourtant supérieure. L’approvisionnement, les circuits de distribution, mais aussi la constitution ethnique de la population des États-Unis et de l’Europe diffèrent sensiblement et sont autant d’éléments d’explication de la primauté du marché outre-Atlantique.

L’approvisionnement des États-Unis est assuré pour 65 % par le seul Mexique, mastodonte de la mangue et premier exportateur mondial du fruit. De plus, ce pays voisin possède, en raison de son étendue du nord au sud, un calendrier de production presque annuel de janvier à octobre. Pour le reste, 26 % des importations américaines proviennent d’un groupe de pays formé, par ordre décroissant, du Pérou, de l’Équateur et du Brésil, qui livrent entre 30 000 et 50 000 tonnes chacun. Les pays d’Amérique centrale et des Caraïbes pourvoient au solde des importations. Avec quatre pays fournisseurs, les États-Unis importent plus de 90 % de leurs besoins.

L’approvisionnement du marché européen est plus morcelé, avec deux origines principales (Brésil et Pérou) qui fournissent 62 % des importations totales, équivalent du Mexique pour les États-Unis. A part la Côte d’Ivoire qui se hisse en troisième place avec 30 000 tonnes depuis deux ans, le solde de l’approvisionnement repose sur au moins cinq pays expédiant de 10 000 à 15 000 tonnes et sur une dizaine d’autres intervenant pour 2 000 à 5 000 tonnes. Mis à part le Brésil capable de fournir des mangues tout au long de l’année avec des fluctuations de volume, les autres fournisseurs présentent des calendriers plus saisonniers, dépassant rarement quatre mois.

Ce rapide panorama montre la grande disparité des sources d’approvisionnement des marchés. Ce fractionnement est générateur de variations de l’offre en termes de variétés mais aussi de qualité des produits. Dans ce domaine, certaines origines pâtissent de problèmes récurrents, notamment les pays ouest-africains qui sont confrontés à des pressions parasitaires particulièrement vives. 

mangue - import USA et UE et prix Kent en france
mangue - import USA et UE et prix Kent en france

Mouche du fruit : le fléau des origines ouest-africaines

En dépit de fluctuations ponctuelles de telle ou telle origine, le marché européen de la mangue progresse en volume. Le produit se démocratise sur les linéaires des distributeurs où il est disponible tout au long de l’année. L’approvisionnement s’effectue en jouant sur le calendrier de production des différents pays fournisseurs, ainsi que sur un éventail variétal permettant l’extension des campagnes. Les importations mensuelles tendent à s’uniformiser, couvrant la demande et l’anticipant même à certaines périodes de l’année.

Le phénomène binaire offre/demande relève parfois du mystère de l’œuf et de la poule, à savoir quel est le générateur de l’un par rapport à l’autre. Est-ce la demande qui aspire la progression de l’offre ou l’amplification de l’offre qui pousse la demande ? La réponse est sans doute médiane, chacun des termes de ce mécanisme de cause à effet constituant des moteurs de l’augmentation du marché, mais souvent avec un décalage temporel.

Dans ce contexte toujours proche du déséquilibre, les aspects qualitatifs prennent une ampleur particulière. Il est difficile de ne pas s’attarder ici sur les problèmes parasitaires dans les pays d’Afrique de l’Ouest. Les infestations par la mouche du fruit des vergers ouest-africains ne sont pas récentes, mais elles perdurent et mettent en péril les flux de fruits expédiés vers l’Europe et, par là-même, la rentabilité des activités d’exportation. La saisie d’un lot à sa réception en Europe implique non seulement la perte de la valeur du produit, de son emballage, des coûts de main d’œuvre pour l’exportation et les différents transports, mais également la traction de la marchandise jusqu’au point de destruction et la destruction elle-même. Autant dire que la saisie d’un lot infesté peut remettre en cause l’équilibre d’une structure d’exportation, surtout si l’interception se renouvelle au cours de la campagne. Et ici l’on évoque seulement les dommages encourus par l’expéditeur. Le problème se répercute aussi pour le réceptionnaire, qui voit son approvisionnement amputé des quantités peut-être programmées avec sa clientèle, sans compter les frais afférents à l’interception.

L’impact économique peut être catastrophique, comme ce fut le cas cette année pour la Guinée qui a fait l’objet de sept interceptions pour des volumes totalisant 320 tonnes. Pour cette origine, la fin de campagne a sonné rapidement. En 2014, l’Union européenne alertait la Côte d’Ivoire en raison du nombre élevé de saisies, lui demandant de mettre en place un programme de lutte pour la campagne suivante sous peine d’interdiction d’exporter ses fruits vers les marchés européens. Ce coup de semonce avait eu pour effet la baisse drastique des interceptions pendant les deux années suivantes. Meilleure prise en compte du problème par l’origine ou moindre pression parasitaire, peu importe, cette chute des interceptions présageait de façon favorable des campagnes à venir. Mais en 2017, les interceptions ont rebondi, ce qui repose le problème dans toute sa gravité. Sur ce point, le Mali, le Burkina Faso et le Sénégal présentent aussi des bilans affligeants en dépit des alertes européennes.

Pourtant, des projets régionaux de lutte contre la mouche du fruit ont été créés pour enrayer ce problème récurrent. Inefficaces, insuffisants face à l’ampleur et à la complexité du phénomène ? On peut en douter lorsqu’on apprend que des produits de traitement n’ont été mis à disposition dans certains pays qu’en début de campagne, trop tard pour avoir un effet. Pire, des produits de traitement, livrés en temps et en heure, sont restés bloqués par les services douaniers de pays producteurs. Faut-il souhaiter l’interdiction d’importation pure et simple d’une ou plusieurs origines pour qu’enfin des mesures coordonnées et à la hauteur des enjeux soient prises ? Prendre conscience d’un problème est salutaire, mais totalement vain si aucune réponse adaptée ne suit. C’est ce qui, malheureusement, semble encore le cas.

mangue afrique ouest - interceptions UE
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