Litchi de Madagascar

  • Publié le 15/11/2017 - Elaboré par GERBAUD Pierre
  • FruiTrop n°252 , Page 28 à 31
  • Gratuit

Les campagnes se succèdent, mais ne se ressemblent pas

Depuis six ans, la filière malgache du litchi connaît des campagnes satisfaisantes, contrastant avec celles des années antérieures qui étaient plus incertaines et souvent plus âpres. L’organisation qui prévaut depuis la saison 2011-12 a, certes, conduit à une quasi-stagnation des volumes exportés vers l’Europe, mais elle garantit une rémunération à l’ensemble des opérateurs. De 14 000-15 000 t en 2010-11 à 18 000 t en 2016-17, les quantités mises en marché se sont stabilisées et semblent correspondre aux capacités d’absorption du marché européen, sur cette période courte de deux à trois mois de campagne articulée sur la fin de l’année calendaire. 

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Une concentration de la consommation du litchi

Au fur et à mesure du déroulement des campagnes de la dernière décennie, la consommation s’est concentrée fortement autour des fêtes de fin d’année. En dehors de cette période, la fourniture du marché européen reste erratique et nettement moins importante en volume. La Thaïlande, traditionnellement présente d’avril à août, a depuis longtemps limité son calendrier d’exportation afin d’éviter la confrontation avec Israël en juillet/août. Encore rares en avril, les litchis de cette origine abandonnent aujourd’hui le marché européen en juin/juillet selon les années, dès l’apparition de fruits d’autres origines en quantités significatives, mais toutefois modérées. C’est ainsi que le Mexique, la Chine et le Vietnam, désireux d’occuper une place sur les marchés européens, ont progressivement limité leurs velléités de conquête en raison du peu d’intérêt des consommateurs européens. A cette période de l’année, ces derniers sont plus enclins à déguster cerises et fruits d’été que des litchis qui ont retrouvé leur caractère exotique et sont donc proposés à des prix élevés.

Cette tendance lourde accroît, par opposition, l’importance de la saison du litchi de l’océan Indien, qui s’incruste dans les habitudes de consommation liées aux fêtes de fin d’année, favorisée par des prix attractifs. La concentration de la consommation est évidente à l’approche des fêtes. L’offre de litchis transportés par avion à partir de fin octobre ou début novembre constitue une amorce de campagne, mais les prix de vente élevés de ces fruits et leur volume limité les confinent dans un succès d’estime. En revanche, la mise en marché des litchis transportés par bateau suscite un enthousiasme plus marqué de la part des consommateurs européens. L’omniprésence des litchis dans la grande distribution, l’effet de masse et la mise en place de promotions à prix ajustés constituent un véritable élément de démocratisation du produit. La période des fêtes passées, le litchi voit sa consommation fléchir de nouveau et son attrait s’amenuiser auprès des distributeurs, qui passent rapidement à d’autres produits phare pour animer leurs magasins. La célébration du nouvel an chinois, dans les pays européens où la population d’origine asiatique est importante, ponctue souvent la commercialisation du fruit. Encore faut-il que cette fête mobile ne soit pas trop tardive par rapport aux capacités d’approvisionnement de litchis de bonne qualité. Cet événement est diversement commenté par les professionnels, certains le considérant comme une opportunité commerciale complémentaire, d’autres comme un phénomène de peu d’ampleur et de faible intérêt. Son impact sur la fin de saison dépend surtout de sa position sur le calendrier et de l’attrait des distributeurs à son égard.

Une campagne 2017-18 plus compliquée

La bonne étoile qui brillait sur la filière du litchi malgache depuis plusieurs années risque de se ternir quelque peu lors de la prochaine campagne. Il convient de préciser que la campagne de commercialisation 2016-17 avait réuni les éléments les plus positifs pour l’obtention de résultats particulièrement satisfaisants.

-          Le caractère de grande précocité de la production malgache, ainsi que le calendrier de la fin d’année 2016, ont permis le démarrage de la commercialisation des fruits expédiés par bateau en semaine 49, offrant ainsi quatre week-ends de vente entre l’arrivée du premier navire et la fin de l’année.

-          L’adaptation des volumes expédiés aux moments forts de la demande a également contribué à l’obtention de bons résultats économiques. Augmenter légèrement les volumes sur les deux navires conventionnels programmés et alléger les quantités expédiées par conteneurs en fin de campagne s’est avéré judicieux en lissant les prix de vente. Les cours se sont mieux maintenus entre le début et la fin de campagne qu’au cours des saisons précédentes.

-          La qualité des fruits et leur bonne tenue dans le temps ont aussi constitué des points forts de la campagne 2016-17. Meilleure coloration et qualité gustative unanimement reconnue ont été d’éminents vecteurs de vente, notamment face à la concurrence sud-africaine qui, cette année, présentait des produits standards et de qualité peu fiable.

Après la situation exceptionnelle de 2016-17, il paraît difficile qu’un tel concours de circonstances favorables se reproduise. Certains facteurs externes semblent déjà moins propices à quelques semaines de la campagne. Il s’agit principalement des conditions météorologiques qui ont accompagné les phases de floraison et de nouaison des litchis. L’hiver austral nécessaire à l’induction de la floraison des arbres a été peu marqué et rapide. Les températures sont remontées nettement dès fin août, enrayant partiellement les phases de floraison. Le manque de précipitations a accentué le phénomène et freiné le développement des fruits. Les arbres sont donc moins chargés, ce qui devrait réduire la production globale de litchi. Toutefois, cette réduction doit être relativisée, dans la mesure où le potentiel de production de Madagascar est très largement supérieur aux quantités exportées chaque année. On estime entre 80 000 et 100 000 tonnes la production totale de l’île, alors que les exportations ne dépassent guère 20 000 tonnes. La conséquence sera l’élargissement des zones de récolte pour mobiliser les quantités attendues par les exportateurs et, par là même, l’allongement des délais entre récolte et livraison des fruits en station de conditionnement. Les litchis risquent également d’être de taille limitée.

Ces facteurs naturels se ressentiront également sur la commercialisation. Le déclenchement officiel de la campagne ne semble guère envisageable avant fin novembre (fin de la semaine 47 ou début de la semaine 48 selon l’évolution des différentes zones de production). Si l’on décompte les temps de cueillette, de conditionnement et de chargement sur les deux navires conventionnels une nouvelle fois programmés, les premiers litchis bateau ne parviendront en Europe qu’en semaine 50 et non 49 comme l’année dernière. Cette semaine et ce week-end de vente en moins pour la commercialisation des litchis auront sans doute des répercussions sur le déroulement de la campagne. Dans ce contexte particulier, les opérateurs étudient les meilleures stratégies pour expédier les fruits dans des conditions optimales pour des arrivées en Europe en semaines 50 et 51. Les volumes envisagés seront équivalents à ceux de la précédente campagne, mais leur répartition sera peut-être légèrement modifiée pour tenir compte du démarrage plus tardif. Ainsi, les quantités expédiées par conteneurs maritimes devraient être allégées afin de permettre une commercialisation plus fluide de la cargaison du second navire, dont l’écoulement s’étalera vraisemblablement en première quinzaine de janvier.

En ce qui concerne l’organisation de la campagne, le dispositif mis en place depuis plusieurs années, et qui a fait ses preuves, sera reconduit. Depuis la dernière campagne, les opérateurs ont poursuivi leurs efforts en termes d’organisation des stations et de certification. Les exportateurs exploitent de nouveaux débouchés vers l’Asie et le Moyen-Orient pour diversifier leurs envois, comme ils l’avaient initié précédemment. Le marché européen étant largement approvisionné, la recherche d’autres débouchés est actuellement le seul moyen pour les opérateurs de Madagascar d’augmenter le volume exporté.

La campagne des litchis avion devrait également débuter plus tardivement qu’en 2016. Les premiers lots seraient mis en marché en première quinzaine de novembre. Cette phase de campagne risque également d’être particulière cette année, dans la mesure où les productions de la Réunion et de Maurice sont annoncées à leur plus bas niveau. Les litchis seront peut-être plus rares et plus chers qu’habituellement.

litchi - UE28 - importations
litchi - UE28 - importations

Pierre Gerbaud, consultant
pierregerbaud@hotmail.com

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