L’avocat après récolte

  • Publié le 2/10/2015 - Elaboré par Cirad
  • FruiTrop n°243 , Page 98 à 102
  • Gratuit

La gestion du fruit après récolte est un facteur primordial. Elle influe autant sur la qualité que sur le rendement puisque les pertes peuvent varier de 5 à 50 %.

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Particularités des fruits climactériques

Les fruits climatériques présentent des caractéristiques physiologiques particulières. Ils doivent être récoltés après avoir atteint un niveau de développement et donc de maturité suffisants. Ce n’est qu’après cette étape qu’ils auront acquis la capacité de synthétiser des quantités d’éthylène suffisantes pour pouvoir amorcer leur mûrissement (forte augmentation de l’activité respiratoire, baptisée par les physiologistes « crise climactérique », marquant le démarrage de profonds changements physiologiques). Seuls les fruits matures (« mature » en anglais) présenteront des qualités organoleptiques satisfaisantes une fois mûrs (« ripe »). L’avocat est un fruit climactérique singulier : il ne peut enclencher son processus de mûrissement qu’après avoir été récolté. Ainsi, l’arbre constitue un des meilleurs moyens de conservation du fruit. Certaines variétés peuvent y rester plusieurs mois, en fonction de la saison. L’aptitude au stockage sur l’arbre est en général très faible ou nulle pour les cultivars antillais, alors qu’elle est élevée pour les hybrides, particulièrement des races guatémaltèque x mexicaine. Cependant, une conservation prolongée peut avoir des conséquences négatives sur la production de la saison suivante. Ces considérations physiologiques soulignent l'importance de la date de récolte. Ainsi, pour évaluer le stade de maturité optimal, plusieurs paramètres variables selon les variétés et les pays de production sont à considérer. L’appréciation visuelle, le poids ou le diamètre des fruits et le nombre de jours après la floraison donnent des informations utiles mais insuffisamment précises. La détermination du taux de matière sèche, fortement corrélée à la teneur en huile, est la méthode la plus couramment employée. L’évaluation du stade de maturité peut être complétée par l’analyse de l’activité enzymatique, de la conductivité électrique, des composants aromatiques ou précurseurs, ou encore par des tests de dégustation après mûrissage du fruit.

 

Entreposage

Refroidissement

La diminution de la température a pour but de ralentir le métabolisme de l’avocat afin de permettre sa conservation. Elle permet de réduire l’activité de synthèse d’éthylène et son action. On cherche donc à amener les fruits à la température la plus propice à leur conservation, le plus rapidement possible après la récolte (idéalement moins de 6 heures). La durée du refroidissement est fonction des températures initiale et finale du fruit, et de l’air ambiant (température, vélocité et humidité relative). Celle-ci varie entre 8 et 10 heures. Il est important d’arrêter la phase de refroidissement 2°C avant la température finale souhaitée afin de s’assurer de ne pas atteindre des températures trop basses pouvant altérer le produit.

Réfrigération

Les températures optimales d’entreposage diffèrent selon la variété, la période dans la saison (maturité) et la durée d’entreposage souhaitée. En général, la température pour les avocats matures varie entre 5 et 12°C, pour une humidité relative de l’air de 85 à 95 %. Les fruits plus fragiles de fin de saison sont dans la fourchette des températures les plus basses. Pour le Hass, les physiologistes conseillent des températures de 5 à 7°C pour les fruits de début de saison et de 4.5 à 5.5°C pour ceux de fin de saison. Il est déconseillé de dépasser quatre semaines d’entreposage à ces températures. Pour le Fuerte, les températures optimales sont de 6 à 8°C. Il est déconseillé de dépasser trois semaines d’entreposage à ces températures. Dans la pratique, les professionnels utilisent une température comprise entre 5 et 6°C pour l’ensemble des variétés commerciales classiques. Les températures doivent être fortement contrôlées pour éviter toute fluctuation. La circulation de l’air doit également être régulée. L’enclenchement du processus de maturation entraîne un dégagement de chaleur qui doit être pris en compte. Le respect de la chaîne du froid est crucial.

Atmosphère contrôlée

L’atmosphère contrôlée, largement utilisée pour les transports longs, permet d’allonger la durée de conservation. Des teneurs en O2 faibles couplées à des teneurs en CO2 élevées permettent de réduire la respiration et la production d’éthylène. On utilise généralement une teneur en O2 comprise entre 2 et 5 % et une concentration en CO2 de 3 à 10 %. On peut ainsi conserver les fruits des principales variétés commerciales classiques entre 5 et 6 semaines, voire plus pour le Hass. Les effets de teneurs en O2 et CO2 inadaptées sont décrits dans la partie « Principales altérations physiologiques ».

Technologies alternatives pour l’entreposage de longue durée

Traitement 1-MCP. L’application de 1-MCP (1-methylcyclopropene) permettrait de limiter l’apparition des symptômes internes du chilling injury (ternissement de la pulpe, brunissement vasculaire) pour des fruits conservés plus de quatre semaines. Cette technique donnerait de bons résultats, notamment pour les variétés vertes qui supportent moins bien les stockages de longue durée que le Hass (en respect des normes en vigueur). Elle est utilisée depuis trois ans sur une partie des fruits sud-africains.

Refroidissement par étapes (Step Down Temperature). Cette technique est utilisée depuis plusieurs années par la filière sud-africaine pour préserver la qualité des fruits et réduire l’apparition des symptômes internes du chilling injury. La température de conservation est abaissée par paliers durant le transport (1 à 2°C par semaine), en s’assurant qu’elle ne soit pas inférieure au final à 3.5°C. Il existe des protocoles (température, durée) pour les différents cultivars et régions d’Afrique du Sud.

Conditionnement

Les avocats à indice de maturité souhaité sont triés, lavés et calibrés avant d’être emballés. Chaque marché a ses propres exigences en termes de conditionnement.

avocat - USA - colis de 5.67 kg
avocat - USA - colis de 5.67 kg
avocat - USA - colis de 11.34 kg
avocat - USA - colis de 11.34 kg
avocat - UE - colis de 4 kg
avocat - UE - colis de 4 kg
avocat - Japon - colis de 6 kg
avocat - Japon - colis de 6 kg

Mûrissage

La température idéale pour permettre le mûrissement est comprise entre 15 et
20°C. Au-delà de 25°C, le mûrissement est irrégulier, des flaveurs désagréables apparaissent et les risques de pourriture augmentent. Ce processus naturel peut aussi être contrôlé. Un traitement à l’éthylène (100 ppm à 20°C pendant 12 à
72 heures selon la maturité du fruit) accélère le mûrissement de 3 à 6 jours. Il est possible d’obtenir des fruits à un état de mûrissement homogène dans des enceintes permettant de contrôler principalement la température, l’humidité et la teneur en éthylène. Néanmoins, le mûrissement reste dépendant de l’état initial de maturité du fruit.

 

Principales précautions à observer en magasin

Les avocats sont très sensibles aux chocs et aux pressions tactiles exercées par le consommateur. Les fruits mûrs ou presque mûrs doivent être conservés à des températures plus basses, comprises entre 1 et 6°C. La vaporisation d’eau est déconseillée.

 

Principales altérations physiologiques de l'avocat après récolte

Altérations liées au stockage

Chilling injury. Ces altérations sont liées à l’exposition à des températures basses, généralement inférieures à 3°C, ou à un stockage prolongé. Les symptômes peuvent apparaître trois jours après le conditionnement, lors de l’entreposage et plus souvent en sortie de chambre froide. Il existe deux types de manifestation du chilling. Le chilling interne se caractérise par un brunissement de la pulpe démarrant à la base du fruit. On observe également parfois un brunissement des vaisseaux dans la même zone. Cette altération se manifeste sur le Fuerte par l’apparition de petites taches sombres dans la pulpe. Les symptômes du chilling externe sont des taches noires irrégulières sur l’épiderme. Elles peuvent apparaître lors de l’entreposage et plus souvent en sortie de chambre froide.

Déficit de O2 et excès de CO2. Une baisse excessive de la teneur en O2 (notamment en deçà de 1 %) peut entraîner l’apparition de taches marron irrégulières sur l’épiderme, qui peuvent se propager à la pulpe. Un excès de CO2 (plus de 10 %) peut entraîner une décoloration de l’épiderme et développer des flaveurs impropres, d’autant plus que la teneur en O2 est basse.

Infestation fongique au champ révélée pendant ou après le stockage

La lutte contre ces maladies passe par une gestion efficace du verger et des traitements adéquats avant la récolte. Après récolte, le fruit doit éviter toute altération physique (chocs), être rapidement réfrigéré et la chaîne du froid doit être maintenue.

Anthracnose. Cette altération est la maladie la plus fréquente survenant durant l’entreposage. Elle est due à l’infection du fruit au verger par Colletotrichum gloeosporioides et ne se révèle que lors du mûrissement. Elle provoque d’importantes nécroses. De simples petites lésions ponctuelles donnent par la suite de larges taches circulaires brunes sur l’épiderme. La pulpe sous-jacente noircit et la pourriture atteint le noyau. La vitesse de développement de cette pourriture dépend de la température de transport et de conservation, et surtout de l’état de maturité des fruits.

Pourriture pédonculaire. Cette maladie est aussi due à l’infection du fruit par un champignon, Botryodiplodia theobromae. De petites taches brun clair apparaissent tout d’abord dans la zone pédonculaire. La pourriture s’étend rapidement au reste du fruit. La pulpe est ensuite envahie jusqu’au noyau. Toute lésion de l’épiderme est propice à l’infestation par ce pathogène.

 

avocat - maladies post-recolte dues a des champignons pathogenes
avocat - maladies post-recolte dues a des champignons pathogenes

Le stade de récolte dans le cas des fruits climactériques

Ce stade est particulièrement important puisque l’état de maturité du fruit est « figé » à la récolte (cf. FruiTrop n°198, page 29, article maturation). L’impact du stade de récolte se décline à deux niveaux (voir schéma) :

sur un plan qualitatif, plus un fruit sera récolté tôt, moins il présentera d’intérêt gustatif, avec une teneur en sucres assez faible (l’enrichissement en sucres est lié à la durée de présence sur le plant) et une capacité faible à développer des arômes ;

sur un plan commercial, un fruit récolté à un stade trop proche de la maturité vraie du fruit aura une capacité de conservation réduite. Mais si le fruit est récolté trop tôt, sa capacité à mûrir peut être insuffisante et il ne pourra pas évoluer correctement en maturation.

Les importateurs sont dépendants du compromis qui peut être trouvé pour concilier qualité gustative et mise en marché. La définition d’un stade de récolte optimum est un réel challenge car il n’y a pas forcément de descripteurs visuels clairs indiquant avec une précision acceptable le stade de maturité avant maturation des fruits climactériques (appelé stade préclimactérique).

En parallèle, avec l’évolution des marchés, cela complique singulièrement le développement de l’affinage (avocat, mangue) : comment être sûr que les fruits ont atteint leur capacité à mûrir ? Comment adapter le procédé d’affinage en fonction du stade de maturité des fruits, sachant que les lots sont hétérogènes ?

Des alternatives sont possibles pour améliorer l’homogénéité des lots, mais cela passe par une interaction forte entre les filières de production et les filières de distribution. Il faudra à terme prendre en compte l’évolution des techniques culturales sur la physiologie des fruits (conservation, métabolisme de la maturation). Il faudra également évaluer la possibilité de trier les fruits par des mesures non destructives, pour disposer de lots homogènes afin d’adapter et de garantir la performance des technique d’affinage.

avocat - stade de récolte
avocat - stade de récolte

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