L'impact des mesures Covid-19 sur la distribution de fruits et légumes en France

  • Publié le 30/03/2020 - Elaboré par DAWSON Carolina
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Premier état des lieux de la situation sur les marchés

L’annonce de la mise en place des mesures de confinement de la population a eu l’effet d’une onde de choc sur les marchés fruitiers européens. La panique a entraîné l’explosion – totalement irrationnelle – de la demande des consommateurs, notamment pour les basiques vitaminés du rayon fruits et légumes, tels la banane, les agrumes, les pommes et les kiwis. La fermeture des collectivités (cantines scolaires) et de la restauration en semaine 12 a notamment impacté le segment de la Restauration Hors Domicile (RHD), qui représentait, selon le CTIFL, 9 % des ventes de fruits et légumes frais en France en 2018, et un report de ces ventes vers le segment de la grande distribution (GMS).

Si certains produits comme la banane ou les agrumes semblent mieux tirer leur épingle du jeu face à cette situation inédite, d’autres, notamment les exotiques, se retrouvent en plus grande difficulté avec des linéaires en forte réduction. Le durcissement des mesures de confinement en semaine 13, prévoyant la fermeture des marchés (sauf dérogations spécifiques dans chaque commune), supprime un débouché additionnel aux fruits et légumes frais, débouché qui représente 12 % des volumes selon le CTIFL. Ainsi, plus de 20 % des ventes de F&L frais seraient concernées en France par ces circuits de distribution et ces produits devront trouver preneur ailleurs.

ventes FL

La banane, « couronnée » produit de crise

Même s’il est encore tôt pour tirer des conclusions, le constat en ces deux premières semaines apocalyptiques est le suivant : la banane résiste et prospère. Sa réputation de « produit de crise » se confirme, et elle s’affiche parmi les valeurs sûres du rayon fruits et légumes. La banane semble moins déstabilisée par la réorganisation des canaux de distribution du fait de son positionnement déjà fortement ancré dans la GMS. Selon le panel Kantar, près de 84 % des ventes de bananes en 2019 étaient concernées par ce canal de distribution contre 75 % pour les ventes générales de fruits en France. La chute de l’activité du segment grossiste semble donc avoir un impact plus restreint que sur d’autres produits comme l’avocat, pour lequel 22 % des ventes se réaliseraient au travers du segment grossiste contre 16 % pour la banane. Enfin, force est de constater que la filière, organisée autour de l’AIB en France, a su montrer une grande réactivité en adoptant des mesures dès la semaine 12, telle la suppression des bananes conditionnées afin d’anticiper les effets des baisses de personnel sur l’approvisionnement et d’assurer la sécurité sanitaire dans tous les maillons de la filière. Les bananes ne sont donc plus vendues en pré-emballé (sachets flowpack) afin de supprimer les lignes de reconditionnement, hors certains cas exceptionnels (ventes pour les drive). Quant aux bananes bio, qui représentent environ 15 % du marché et sont traditionnellement présentées emballées en grande distribution, une dérogation exceptionnelle a été obtenue en accord avec les autorités. Il est possible de les vendre en vrac en points de vente généralistes, sous réserve de la mise en place de dispositions visant à assurer la traçabilité des bananes bio jusqu’au consommateur. Cette suppression de l’emballage, en bio comme en conventionnel, ne concerne pas les bananes conditionnées à l’origine.

Circuits de distrib
Circuits de distrib - détail

D’autres produits, comme les tomates ou les fraises, verront également leur conditionnement simplifié en GMS.

En revanche, les exotiques semblent plus pénalisés. Outre la réduction des linéaires et une consommation en perte de vitesse, le segment de « l’avion » est particulièrement handicapé par la baisse de fréquence du transport aérien. Certains produits, telles les mangues avion ou melons d’outre-mer ne seraient même plus expédiés dans certains cas. L’avocat, à mi-chemin entre exotique et produit de grande consommation, semble lutter pour s’adapter à ce nouveau contexte. Si les programmes en supermarchés sont assurés et se maintiennent, notamment en France où la GMS absorbe déjà 77 % des volumes destinés aux ventes de détail, le produit pâtit très fortement de la fermeture de la RHD, en particulier dans les marchés du nord de l’Europe. On estime que le segment de la RHD absorbe 1/3 des volumes contre 2/3 pour les ventes au détail (grossiste + GMS).

Le manque de main d’œuvre, un impact sur la production planétaire

La sécurité des travailleurs est un sujet de préoccupation dans les différentes zones de production face à la propagation du COVID-19. La généralisation des mesures de confinement dans les différents pays d’Amérique latine en semaine 13, avec l’instauration dans certaines régions de couvre-feux et des réductions de personnel dans les stations d’emballage, auront forcément des répercussions en termes de productivité et de volumes disponibles à l’exportation. Les effets sont également notables sur la chaîne d’approvisionnement. En effet, les inspections portuaires à l’exportation et à l’importation, le déchargement des marchandises, le transport intracommunautaire, le reconditionnement et toutes les étapes de la chaîne d’approvisionnement requérant des interactions humaines, sont perturbés en raison de la limitation du personnel.

En Europe en particulier, les campagnes de fruits de printemps sont dans le collimateur en raison du manque de main d’œuvre saisonnier pour les récoltes. En France, les agriculteurs prévoient une pénurie de travailleurs, du fait de l’absence des cueilleurs saisonniers venus notamment d’Espagne et du Maroc. Au Royaume-Uni, on estime à 70 000 le personnel nécessaire pour la cueillette des fruits locaux (source : reefertrends), personnel qui provient essentiellement des pays de l’est de l’Union européenne. Il en est de même en Allemagne et dans d’autres pays de l’UE qui utilisent de la main d’œuvre saisonnière étrangère. Des appels de l’interprofession des fruits et légumes frais (Freshfel) commencent à se faire entendre pour demander des dérogations et assurer la récolte des productions locales. Les gouvernements cherchent des moyens de réduire tout risque de pénurie, avec notamment l’installation des « voies vertes » pour permettre aux produits frais de traverser rapidement les frontières de l'UE, pour recruter des cueilleurs et assouplir les règles de voyage pour les travailleurs migrants.

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